Les entreprises martiniquaises du BTP ne vont généralement pas bien.
Elles sont pour beaucoup trop endettées, elles n’ont généralement pas de carnet de commande suffisant, elles voient la pyramide des âges de leur force de travail se déformer dangereusement avec un manque dramatique de jeunes salariés et elles ont encore trop peu de visibilité sur la date de sortie des affaires.
A ces difficultés aux causes exogènes, viennent se greffer des problématiques qui appartiennent aux acteurs du secteur eux mêmes puisque par exemple, les offres de prix appartiennent aux acteurs et la possibilité d’agir plus collectivement pour peser ne dépend que d’eux.
On parle de plus en plus de relance du BTP dans les mois à venir. Pour les entreprises qui seront encore en vie quand cela arrivera (il faut le souhaiter sans aucune réserve), il s’agira de ne pas se retrouver dans la même situation qui a conduit inexorablement à la crise prolongée et sévère que ce secteur vit.
Une entreprise peut être en cessation de paiement pour de multiples raisons. Elle peut n’avoir aucune rentabilité avec beaucoup de chantiers en cours de réalisation et un chiffre d’affaires conséquent. Elle peut aussi avoir une rentabilité correcte, mais se retrouver après épuisement des facilités bancaires et autres crédits fournisseurs, dans l’impossibilité de payer les salaires, les charges sociales et fiscales, les biens et services nécessaires à la réalisations des chantiers, si elle n’est pas payée dans les délais par ses clients.
Dans les deux cas l’entreprise sera en grande difficulté et va risquer la disparition si des actions correctives ne sont pas mises en œuvre rapidement.
Pour une relance du BTP martiniquais solide et durable il faudra donc que les parties prenantes règlent au préalable et au plus vite :
– la question des délais de paiement à rallonge pour trop d’acteurs-clé de la commande publique,
– les niveaux de prix dans le domaine du logement social, construction neuve et réhabilitation/ confortement du parc. Parler de délais de paiement très rapides pour les bailleurs sociaux ne résoudra rien.
Des solutions pragmatiques existent, et elles demandent que toutes parties acceptent le jeu de transparence et de la responsabilité collective. Seul le courage d’affronter de front les vieux démons qui minent depuis trop longtemps ce secteur permettra le retour d’un BTP martiniquais viable et fort, capable de satisfaire tous ses besoins avec des entreprises locales à nouveau très performantes, dont bien entendu les « majors » domiciliés ici depuis plusieurs décennies au travers de filiales bien intégrées, et qui ont des pratiques sociales internes et RSE très progressistes.
Nos entreprises peinent à trouver de jeunes salariés motivés, les maîtres d’ouvrages commencent à peiner à trouver des entreprises pour répondre à leurs appels d’offres. Il est grand temps de stopper le massacre.
Jean-Yves Bonnaire