Travail illégal dans le BTP : employeurs et travailleurs, attention aux lourdes sanctions !

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« La fraude n’est pas une stratégie, c’est une bombe à retardement qui finit toujours par exploser. »

Travail illégal dans le BTP :

Une lutte nationale, un enjeu crucial pour tous et une tolérance zéro !

Vendredi dernier, le 21 février, il a été signé une convention de lutte contre le travail illégal dans le secteur du BTP avec la signature d’une convention de partenariat impliquant les autorités judiciaires, les services de l’État et les acteurs économiques et les syndicats. Il est à noter que ce combat dépasse largement les frontières de la Martinique : il concerne aussi l’ensemble du territoire français, qu’il s’agisse de la Guadeloupe, de la Guyane, de Mayotte, de La Réunion ou de l’Hexagone. Dans toutes ces régions, la lutte contre le travail dissimulé représente un enjeu fondamental pour la protection des travailleurs, la pérennité des entreprises et l’équilibre économique.

Lors de cet événement, la procureure adjointe Pascale Ganozzi a prononcé un discours très instructif, mettant en lumière les impacts dramatiques du travail illégal, les moyens de lutte déployés par les autorités et les sanctions encourues par les fraudeurs.

Pascale GANOZZI, procureure de la république adjointe

Une réalité locale qui illustre un phénomène national

Dès le début de son intervention, Mme Ganozzi pointe un phénomène sociétal ancré en Martinique : la culture du « job », un terme qui désigne le travail non déclaré, souvent perçu comme une pratique anodine, voire légitime. Dans les tribunaux correctionnels de l’île, de nombreux prévenus expliquent leurs revenus en affirmant simplement : « je jobe ».

Ce mode de travail, bien qu’entrant dans une logique de débrouillardise, engendre des conséquences dramatiques sur le long terme :

  • Les travailleurs non déclarés ne cotisent pas et se retrouvent sans retraite ni protection sociale.
  • La concurrence déloyale nuit aux entreprises qui respectent la loi et affaiblit l’économie locale.
  • Les conditions de travail sont souvent précaires et dangereuses, entraînant une recrudescence des accidents professionnels.

Mais ce constat ne s’arrête pas à la Martinique. Dans toutes les régions françaises, y compris en Outre-mer, la fraude au travail dissimulé prend des formes similaires, fragilisant aussi bien les travailleurs que les entreprises du BTP qui peinent à rester compétitives face aux employeurs frauduleux.

Une mobilisation de l’État et des acteurs économiques

Face à cette situation préoccupante, l’État renforce son dispositif de contrôle à travers les Comités Opérationnels Départementaux Anti-Fraude (CODAF). Ces comités, co-présidés en formation plénière par les préfets et les procureurs de la République, et présidés exclusivement par les procureurs en formation restreinte, jouent un rôle central dans la répression du travail illégal.

Les CODAF permettent notamment de :

  • Coordonner l’action des Urssaf, des services de police, de la gendarmerie et de l’inspection du travail.
  • Programmer des contrôles ciblés en fonction des remontées d’informations sur les secteurs à risque.
  • Prononcer des sanctions administratives et judiciaires contre les employeurs fraudeurs.

En Martinique, huit opérations majeures sont déjà prévues pour 2025, illustrant une intensification des efforts de contrôle.

Les signataires

Des sanctions lourdes pour les fraudeurs

Mme Ganozzi a insisté sur la fermeté de la justice à l’égard des employeurs qui recourent au travail dissimulé. Les sanctions encourues sont sévères et peuvent être administratives et judiciaires :

🔹 Sanctions administratives immédiates :

  • Fermeture administrative de l’entreprise jusqu’à six mois.
  • Obligation de régulariser les salariés auprès de l’Urssaf.

🔹 Sanctions judiciaires lourdes :

  • Peines d’emprisonnement (souvent assorties du sursis, mais parfois fermes).
  • Interdiction de gérer une entreprise.
  • Saisie des biens des fraudeurs (immeubles, véhicules, bateaux, numéraires…).

🔹 Sanctions spécifiques en cas d’accidents du travail :

  • Les travailleurs illégaux étant souvent mal formés et mal protégés, les risques d’accidents graves ou mortels sont élevés.
  • En cas d’accident, les chefs d’entreprise sont directement responsables et encourent de lourdes poursuites.

Mme Ganozzi a également souligné que beaucoup de travailleurs non déclarés, notamment en situation irrégulière, hésitent à dénoncer leurs employeurs par peur de représailles. Cette réalité complexifie la lutte contre le travail dissimulé et renforce la nécessité de contrôles rigoureux.

« Travailler sans être déclaré, c’est accepter de vivre sans droits et sans avenir. »

Un appel à la responsabilité collective

Loin d’être un simple rappel à la loi, le discours de Mme Ganozzi se veut également un appel à la responsabilité collective. Lutter contre le travail illégal ne repose pas uniquement sur la répression et les contrôles, mais aussi sur une prise de conscience des employeurs et des travailleurs.

🔹 Aux employeurs, elle rappelle que :

  • Déclarer ses salariés n’est pas une option mais une obligation légale.
  • Des dispositifs d’accompagnement existent (via la Direction des Entreprises et des Services – DES).
  • Une entreprise qui fraude prend un risque énorme, aussi bien financier que pénal.

🔹 Aux travailleurs, elle lance un message fort :

  • Accepter un emploi non déclaré, c’est se condamner à l’insécurité financière et sociale.
  • Il est essentiel de revendiquer ses droits pour ne pas se retrouver sans retraite ni couverture santé.

« Cette convention de partenariat est une première pierre à l’édifice »,

a-t-elle conclu, appelant chacun à prendre ses responsabilités pour enrayer ce fléau.

Un enjeu qui dépasse la Martinique

Si ce discours a été prononcé en Martinique, il résonne bien au-delà de l’île. Dans tous les territoires français, y compris en Guadeloupe, en Guyane, à Mayotte et à La Réunion, le travail illégal gangrène le secteur du BTP et d’autres secteurs d’activité.

Les mécanismes de fraude sont les mêmes, tout comme les conséquences économiques et humaines. Les CODAF, présents sur l’ensemble du territoire, intensifient leur action pour faire reculer ces pratiques.

Le message des autorités est donc clair : l’impunité n’a plus sa place. Il est temps que travailleurs, employeurs et institutions unissent leurs forces pour bâtir un environnement de travail plus juste et plus sécurisé.

Le travail dissimulé n’est pas une fatalité, mais un choix auquel il est urgent de mettre fin.

Philippe PIED

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