La loi du 11 février 2005 sur l’accessibilité a largement modifié les pratiques dans le secteur du bâtiment, notamment pour les logements neufs. Depuis l’arrêté du 11 septembre 2020, l’installation de douches accessibles dites « zéro ressaut » est devenue obligatoire dans de nombreux cas.
Pour accompagner les professionnels dans la mise en œuvre concrète de ces installations, la Direction de l’Habitat, de l’Urbanisme et des Paysages (DHUP) a publié en janvier 2025 une version révisée du guide technique rédigé par le CSTB.
Cette version V3 remplace le document de 2012 et prend en compte les dernières évolutions réglementaires. Elle précise les solutions validées, les cas d’application, et les exigences techniques à respecter, avec un focus adapté aux territoires ultramarins.
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Une douche zéro ressaut, c’est quoi exactement ?
La douche dite « zéro ressaut » est définie par des critères précis. Il s’agit d’une zone de douche sans aucune marche ni ressaut, accessible de plain-pied sur au moins un grand côté.
Ses dimensions minimales sont de 120 x 90 cm. En face de cette zone, un espace d’usage d’au moins 130 x 80 cm doit être prévu, sans superposition avec la zone de douche elle-même. Enfin, l’ensemble de la salle d’eau doit offrir un espace de manœuvre libre de 1,50 m de diamètre.

Cette configuration vise à garantir l’autonomie des personnes à mobilité réduite, en facilitant l’accès à la douche sans obstacle ni danger. Elle est aujourd’hui exigée pour la plupart des logements neufs, à quelques exceptions près : maisons individuelles construites pour son propre usage, logements situés en étage dans des bâtiments sans ascenseur, ou encore logements dont le permis de construire est antérieur à certaines dates seuils fixées par la réglementation.
Deux choix possibles dès la conception : ouverte ou cloisonnée
Le guide distingue deux grandes configurations de douche zéro ressaut, qui ont chacune un impact fort sur la conception de la pièce : la zone ouverte et la zone cloisonnée.
Dans une douche ouverte, il n’y a pas de parois pour contenir les projections d’eau. Par conséquent, la pente du sol doit être prévue sur toute la surface de la salle d’eau, avec une inclinaison minimale de 1 % vers le point d’évacuation.
L’étanchéité et les revêtements anti-glissance doivent eux aussi couvrir l’ensemble de la pièce. Cette solution est fréquente dans les petites salles d’eau mais impose une coordination stricte avec le gros œuvre et les corps d’état secondaires, notamment pour la pose d’appareils suspendus, la gestion des seuils et la répartition des pentes.

Dans une douche cloisonnée, les parois fixes ou mobiles permettent de contenir les projections d’eau. Dans ce cas, la pente n’est requise que sur la zone de douche proprement dite (120 x 90 cm minimum), et non sur toute la pièce.
L’étanchéité reste cependant obligatoire sur l’ensemble de la salle d’eau, même en dehors de la zone de douche. C’est souvent la solution retenue lorsqu’on souhaite maintenir une planimétrie plus classique sur le reste du sol ou lorsque des contraintes acoustiques imposent une délimitation claire.

Le choix entre ces deux configurations doit être fait en amont, car un passage de l’une à l’autre implique des modifications lourdes : reprise de pente, étanchéité, modification des revêtements, etc.
Matériaux, pente, étanchéité : les prescriptions à respecter
Le guide définit un ensemble d’exigences techniques à respecter, quel que soit le type de configuration choisie.
- Pente : le sol fini doit présenter une pente d’au moins 1 % vers le siphon, le caniveau ou la bonde. Cette pente peut être réalisée par une chape, un receveur prêt à revêtir ou un receveur fini.
- Étanchéité : en raison de la très faible réserve d’eau dans les zones sans ressaut, l’étanchéité doit être totale, y compris en partie courante de la salle d’eau. Elle doit protéger les supports (planchers, murs, cloisons), éviter les remontées capillaires, et garantir la durabilité de l’ouvrage. Des systèmes avec Avis Technique ou ATEx sont exigés.
- Revêtements : les revêtements de sol doivent répondre à des critères de résistance à la glissance (PN12 selon la norme NF P 05-011). Sont admis les carrelages collés (DTU 52.2) et les revêtements PVC spécifiques. Les parois murales doivent être protégées jusqu’à 1,80 m de hauteur.
- Acoustique : dans les logements collectifs, une isolation aux bruits d’impact est requise. Une sous-couche acoustique mince (SCAM) est alors posée sous la chape ou sous les receveurs, sauf en zone de douche bien délimitée.
Trois solutions techniques pour la mise en œuvre
Le guide distingue trois grands types de solutions pour réaliser une douche zéro ressaut :
- La zone de douche maçonnée : réalisée in situ avec forme de pente, chape, étanchéité et revêtement. Compatible avec carrelage ou PVC. Cette solution permet une adaptation fine aux contraintes de chantier, mais exige une réservation suffisante pour le siphon et un calepinage précis.
- Le receveur prêt à revêtir : panneau rigide préfabriqué avec pente intégrée et surface à carreler. Il doit être couplé à un système d’étanchéité validé par AT ou ATEx. À ce jour, il n’existe pas encore de solution évaluée pour les configurations ouvertes avec sous-couche acoustique.
- Le receveur fini : préfabriqué en usine avec bonde intégrée, sans ressaut sur au moins un côté. Il doit permettre un raccord étanche avec le sol carrelé, via une bande d’étanchéité collée. Cette solution n’est utilisable que si l’on dispose des références exactes du receveur et du carrelage, afin d’assurer une continuité altimétrique parfaite.
Chaque solution a ses contraintes techniques (pente, acoustique, épaisseur de dalle, compatibilité étanchéité/siphon), ce qui impose une réflexion globale très en amont de la phase chantier.
Points de vigilance pour une mise en œuvre réussie
Le guide attire l’attention des professionnels sur plusieurs points sensibles qui conditionnent la réussite de l’installation :
- Le positionnement du siphon : il doit être proche des murs et de la gaine technique pour réduire les surépaisseurs et faciliter l’évacuation.
- Les raccords étanchéité/sol/mur/siphon : chaque jonction doit être traitée avec des produits compatibles, validés par un AT ou ATEx.
- Le choix du siphon : en configuration acoustique, il est recommandé d’utiliser des siphons avec dispositif de découplage entre le corps et la rehausse.
- La coordination entre corps d’état : les dimensions exactes des receveurs, épaisseurs de carrelage, choix d’étanchéité et mortier-colle doivent être connus avant la phase chantier, et mentionnés dans les DPM.
- L’entretien : les siphons et bondes doivent être entretenus régulièrement, et les mastics de finition vérifiés en périphérie de la zone de douche.
Ce guide fournit ainsi une base technique essentielle pour tous les acteurs impliqués dans la conception ou la réalisation de logements neufs intégrant une douche accessible « zéro ressaut », notamment dans les territoires ultramarins où les contraintes de chantier et les types de plancher peuvent varier considérablement.
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