Dans une interview accordée à France Info le 23 octobre 2024, Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation Urbaine, s’est exprimée sur les défis majeurs que traverse le secteur du logement en France. Avec un marché marqué par la hausse des coûts des matériaux, la montée des taux d’intérêt et une instabilité ministérielle prolongée, Mme Létard a souligné l’importance de la stabilité pour redonner confiance aux acteurs de l’immobilier. Tout en reconnaissant la nécessité de s’adapter aux contraintes budgétaires, elle a insisté sur une approche pragmatique, axée sur des mesures concrètes plutôt que sur une nouvelle réforme législative. La ministre a également abordé plusieurs enjeux clés, dont la relance du prêt à taux zéro, la fin du dispositif Pinel, l’urgence de la rénovation énergétique des passoires thermiques, et l’aménagement des restrictions sur les locations de logements classés G à partir de 2025.
Interview de Mme Valérie Létard, ministre du logement et de la rénovation urbaine, à France Info le 23 octobre 2024, sur la politique du logement.
- Valérie Létard – Ministre du logement et de la rénovation urbaine ;
- Salhia Brakhlia – journaliste ;
- Jérôme Chapuis – journaliste
Média : France Info
Texte intégral
SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Valérie LETARD.
JEROME CHAPUIS
Bonjour.
VALERIE LETARD
Bonjour.
SALHIA BRAKHLIA
Vous êtes à la tête d’un ministère dont le secteur est en crise depuis plusieurs mois, voire plusieurs années. Vous êtes la sixième ministre du Logement en sept ans sous la présidence d’Emmanuel MACRON. Est-ce que cette instabilité en fait, elle a beaucoup, voire, contribué, elle a créé cette crise du logement ?
VALERIE LETARD
Je crois qu’au-delà de l’instabilité, il y a aussi un contexte général qui est là depuis quand même quelques années, un contexte général qui passe par l’augmentation du prix des matériaux, des taux d’intérêt qui ont été fortement augmentés. En fait, il y a dans l’année 2022, une difficulté du monde de l’immobilier et du coup de l’engagement dans l’accession à la propriété ou dans les transactions, lié aussi à ce contexte général.
JEROME CHAPUIS
Mais dans ce contexte, il y a besoin de stabilité, précisément ?
VALERIE LETARD
Complètement. Et d’ailleurs, je pense que si aujourd’hui, le monde du logement est venu massivement et je suis allée à sa rencontre, et si nous travaillons aujourd’hui, la première chose que j’ai fait, c’est d’écouter le message. Et le premier message, justement, qui m’a été délivré par le secteur du logement, c’est d’essayer de maintenir une stabilité dans les normes et dans les règles. Chacun sait bien qu’on est dans un contexte budgétaire difficile et que le logement n’échappera pas à les nécessaires rigueurs budgétaires. Quand je dis rigueur, c’est nécessaire effort de contribution à réduire la dette publique tout en étant ambitieux et tout en proposant, malgré tout, des solutions.
JEROME CHAPUIS
Ça veut dire qu’il n’y aura pas de énième loi, il n’y aura pas de loi LETARD ?
VALERIE LETARD
Écoutez, moi, je considère qu’on est dans un moment où c’est le pragmatisme et l’efficacité qui priment. Et ça ne passe pas forcément par un grand projet de loi. Ce dont je suis certaine, c’est qu’il faudra certainement plus que jamais travailler avec les parlementaires sur des objets, sur des sujets, sur des initiatives parlementaires. On va réfléchir à la meilleure façon d’être efficace, d’avancer et de débloquer tout ce qui, aujourd’hui, a grippé les maillons de la chaîne de production du logement et l’accession au logement, quelle que soit la situation, que l’on soit étudiant, que l’on n’arrive pas à trouver un logement étudiant, ou que l’on soit, aujourd’hui, dans des logements qui sont sous-occupés, mais pour décohabiter, pour sortir d’un logement qui est trop grand par rapport au sien, il faut des plus petits logements. Comment on adapte, en fait, et comment on dégrippe, comment on trouve les solutions pour relancer la machine et la construction, mais aussi la fluidité du parc ?
SALHIA BRAKHLIA
On va rentrer dans le détail. Comment être efficace sans dépenser plus ? Le budget est en discussion à l’Assemblée, en ce moment, et nombre de mesures concernent votre périmètre. Il y a d’abord le prêt à taux zéro, le prêt à taux zéro accordé aux primo-accédants qui achètent dans le neuf, en fonction de leurs ressources et de la localisation du bien en question. Il faut qu’il soit acheté en zone tendue, aujourd’hui. Est-ce que ces critères vont être modifiés ?
VALERIE LETARD
Oui, tout à fait, puisque, aujourd’hui, on permettra, en fait, aux primo-accédants d’accéder à la propriété sur du neuf comme sur du collectif, sur tout le territoire, zone tendue, zone détendue. On aura, effectivement, dans l’amendement qui va être déposé, on vient compléter des prêts à taux zéro qui existent déjà, mais qui étaient restreints sur le territoire. On aura le neuf en collectif, en zone détendue, puisqu’il existe déjà en zone tendue, et sur tout le territoire, l’individuel.
JEROME CHAPUIS
Ça, c’est juste pour 2025 ?
VALERIE LETARD
Ah, c’est juste pour 2025. En tout cas, l’amendement, il lance la machine, et l’objectif, c’est bien d’essayer de poursuivre l’effort. Ça veut dire qu’il faut que les acheteurs en profitent au plus vite. En tout cas, toutes les initiatives, j’encourage, bien évidemment, tous ceux qui, aujourd’hui, essayent d’aller vers l’accession à la propriété. Il y a deux choses. Vous avez vu qu’on est dans une trajectoire qui est en train, enfin, propice à la baisse des taux d’intérêt. Vous avez vu que ça a commencé, moins 0,25. Un prix à taux zéro qui vient accompagner des prêts, des taux d’intérêt qui diminuent. Tout cela, mis bout à bout. Vous imaginez bien que pour un primo accédant, il y a une fenêtre de tir. Je les encourage à la saisir pour accéder, d’une part, et libérer du locatif.
SALHIA BRAKHLIA
Mais il y a des conditions, il y a des conditions de ressources, notamment. Est-ce que vous y touchez à ça ?
VALERIE LETARD
Les conditions de ressources, on va essayer, là-dessus, d’être attentifs. Ce sont les décrets qui le feront, alors, ce sont des conditions de ressources. En fait, par catégorie, effectivement, de revenus, vous avez des taux plus ou moins importants. Ces taux, on va essayer de faire en sorte qu’ils soient suffisamment attractifs. Il y aura peut-être un petit décalage entre le collectif ou l’individuel, pour encourager le collectif, bien sûr.
SALHIA BRAKHLIA
Oui, si on achète un appartement ou une maison.
VALERIE LETARD
On aura un petit peu plus si on a le collectif, mais il n’y aura pas un gros écart entre collectif et individuel, mais très honnêtement, l’idée, c’est vraiment relancer la machine, donner un vrai signal au primo-accédant, libérer du locatif pour des ménages modestes et moyens.
JEROME CHAPUIS
Ça va coûter combien à l’État ?
VALERIE LETARD
C’est un coût qui s’étale en fait sur plusieurs années et qui va être en fonction du calibrage. Je ne vais pas vous donner un chiffre exact. Non, mais vous savez pourquoi on vous pose la question. Il y a un contexte budgétaire qui est tendu.
VALERIE LETARD
Alors, je vais vous dire, le budget du logement, nous supprimons le PINEL, par quoi le remplacent-on ? Donc, je vous ai parlé, par exemple, de l’amendement Jolivet, entre 2,5 milliards par an de PINEL et un amendement encourageant qui n’a pas le même impact, mais qui va avoir un effet sur la construction forte, ça montre bien que tout en économisant beaucoup, on peut avoir des dynamiques. Pour le prêt à taux zéro, on est exactement dans la même logique.
JEROME CHAPUIS
Ce sera à l’équilibre. Ce sera même, en fait, entre ce qu’on a supprimé comme initiative par rapport… Le PINEL, on sait depuis très longtemps qu’il s’arrête au 31 décembre 2024.
SALHIA BRAKHLIA
Il n’est pas question de le prolonger ? C’est la demande des professionnels. On rappelle ce que c’est le PINEL, c’est un dispositif qui incitait à la construction via une incitation fiscale, c’est fini, le 31 décembre, c’est terminé ?
VALERIE LETARD
Le 31 décembre 2024, c’est terminé et le secteur le sait depuis très longtemps, puisqu’il y a des années que le PINEL était fixé, avait une extinction au 31 décembre 2024. La question qui se pose, c’est quoi après ? Quoi après ? Il y a différentes pistes, j’en ai évoqué certaines, le PTZ, l’amendement Jolivet, qui est typiquement un amendement porté par le Parlement, qui reçoit toute l’attention du Gouvernement. Pourquoi ? Parce qu’en fait, ce sont plusieurs solutions moins impactantes sur le budget, plus efficaces peut-être aussi. Le PINEL avait montré aussi ses limites dans la façon dont il se mettait en oeuvre. Très franchement, aujourd’hui, loin d’être sans réponse, on essaye de construire des relais, des boosters de la relance de la production, de l’accession et du parcours résidentiel, mais derrière, il faut continuer….
SALHIA BRAKHLIA
Mais relancer la construction parce qu’effectivement, la construction est en crise. Gabriel ATTAL, ancien Premier ministre, avait pour objectif 30 000 logements neufs en trois ans. Est-ce que c’est l’objectif que vous maintenez ?
VALERIE LETARD
30 000 logements neufs en trois ans, là, vous me parlez d’une mesure particulière qui était typiquement engagée pour le logement. Typiquement, nous avions des collectivités qui s’étaient embarquées dans cette direction. Dans le cadre des débats budgétaires, c’est vrai qu’il y avait une interrogation sur des gels. Aujourd’hui, sur territoire engagé pour le logement, nous avons donné l’assurance à toutes les collectivités que ces gels seraient levées et que ces crédits seraient présents pour les accompagner. Donc, nous travaillons avec ces collectivités aujourd’hui, nous les avons assurés de notre soutien et au-delà, sur d’autres dispositions qui avaient fait l’objet effectivement de gel, nous avons fait en sorte d’être au rendez-vous sur les coûts partis des projets sur la rénovation thermique des logements HLM par exemple. Donc, des sujets comme ça, on les a travaillés, on les débloque, on les fait avancer petit à petit. Ça aussi, c’est le travail d’un Gouvernement qui arrive et qui essaye de regarder quelles sont les choses sur lesquelles on peut agir, malgré la contrainte budgétaire, sans remettre en question les équilibres. Et croyez-moi, ça n’est pas simple, mais il y a des solutions.
JEROME CHAPUIS
Valérie LETARD, il y a une info ce matin chez nos confrères de l’opinion qui peut avoir un impact sur le prix, enfin en tout cas sur les acheteurs. Le Gouvernement envisagerait de permettre aux départements d’augmenter leur part dans ce qu’on appelle abusivement les frais de notaire, les droits de mutation à titre onéreux au moment d’une vente. Jusqu’ici, c’est plafonné à 4,5%. Est-ce que vous confirmez cette intention ?
VALERIE LETARD
Écoutez, aujourd’hui, je n’ai pas d’annonce à faire sur ce sujet, ce que je peux vous dire, c’est qu’en même temps, moi, j’imagine bien et je comprends bien que les collectivités qui voient les baisses de leur DMTO, qu’est-ce que c’est les DMTO ?
JEROME CHAPUIS
Pour droits de mutation à titre onéreux.
VALERIE LETARD
Les Droits de mutation à titre onéreux, c’est une taxe sur les frais de notaire qui va au département et qui, plus les transactions immobilières sont nombreuses, plus cette dotation est importante. Comme les transactions immobilières, en clair, les ventes de logements, les constructions pour des réseaux d’augmentation du taux d’intérêt, difficultés d’accès aux prêts se sont fortement écroulées et c’est bien le sujet, d’ailleurs, qui m’amène à porter toutes les mesures que je viens d’évoquer, forcément, on essaie aujourd’hui, et les collectivités, attendent des mesures pour venir…
SALHIA BRAKHLIA
Compenser ?
VALERIE LETARD
Compenser…
JEROME CHAPUIS
On comprend que c’est dans les tuyaux…
VALERIE LETARD
Pour autant…
SALHIA BRAKHLIA
Mais est-ce que ça veut dire que les frais de notaire vont augmenter ?
VALERIE LETARD
Écoutez, aujourd’hui, moi, vous savez bien qu’on est dans un débat parlementaire qui va se construire à l’Assemblée et au Sénat. À ce stade, je vous dis, moi, je n’ai pas d’annonce à faire sur le sujet. Il y a, en même temps, des collectivités qui attendent. De l’autre côté, on a une fluidité du marché dont on essaie de reconstruire les éléments, baisse des taux d’intérêt. Demain, il y aura peut-être le taux du livret A, il y a le prêt à taux zéro, c’est-à-dire qu’on relance une mécanique : attention à ne pas la gripper. Aujourd’hui, on est en train de regarder, à trouver l’équilibre au travers du travail parlementaire qu’on mènera. Moi, ce que je peux vous dire, c’est que si on relance la production de logements, si on relance, si on remet le marché du logement en bonne forme, ça rapportera beaucoup plus qu’une augmentation de la taxe, puisqu’en fait, ces transactions immobilières, quand elles baissent, Département du Nord, moi, je peux vous dire, cette année, c’est moins soixante millions de DMTO liés à la chute des transactions.
SALHIA BRAKHLIA
Donc vous n’êtes pas pour augmenter la part des départements ?
VALERIE LETARD
Moi, je suis, en tout cas, attentive à trouver le bon équilibre et à ne pas gripper quelque chose qu’on essaie de…
SALHIA BRAKHLIA
Juste sur la construction, parce que c’est très important. C’est ce que nous disent les maires qui défilent sur ce plateau, les maires, les collectivités locales qui refusent de délivrer les permis de construire à cause de la loi zéro artificialisation nette. C’est la loi qui les contraint, qui les empêche de construire. Qu’est-ce que vous leur dites à eux ?
VALERIE LETARD
Vous savez, c’est la loi climat, c’est-à-dire qu’on est quand même dans un exercice compliqué qui veut que sur des enjeux de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, et là, c’est la rénovation thermique des logements, sur des enjeux de souveraineté alimentaire, garder des terres pour l’agriculture, ne pas avoir d’inondations parce qu’on n’a pas artificialisé les sols, c’est ça le ZAN. Et dans le même temps, un besoin de transformer nos territoires, accompagner notre industrie, construire des usines vertes, des usines à batterie, construire des EPR pour avoir une énergie propre, ça nécessite du foncier, et le logement nécessite du foncier. Donc, aujourd’hui, que nous demande le Premier ministre, sans remettre en question la nécessaire bonne consommation des terres, on ne peut pas faire n’importe quoi aujourd’hui sur le foncier. Comment on essaie d’assouplir les règles ? C’est un travail qu’avec Catherine VAUTRIN, qui travaille avec les collectivités sur le sujet, et moi-même sur la partie foncier et logement, nous allons engager rapidement avec le Parlement, nos sénateurs, nos députés travaillent beaucoup sur le ZAN, on prendra des dispositions pour assouplir les règles.
SALHIA BRAKHLIA
Assouplir les règles, pardon, c’est retarder le calendrier ? Parce que c’est d’ici 2031.
VALERIE LETARD
Alors ça, il y a plein de pistes possibles, aujourd’hui elles ne sont pas arrêtées, mais croyez-moi, foncier, logement, on a besoin d’assouplir les règles, c’est évident.
JEROME CHAPUIS
Valérie LETARD, on va reprendre ce débat avec vous dans un instant, vous êtes avec nous jusqu’à 9h, on laisse passer le fil info, il est 8 h 45, Maxime GLORIEUX.
(…)
JEROME CHAPUIS
Et toujours avec la ministre du Logement et de la Rénovation Urbaine, Valérie LETARD. Depuis tout à l’heure, vous n’arrêtez pas de parler du débat parlementaire. Vous dites que la parole au parlementaire. Il se trouve qu’une heure avant vous, il y a une heure, la porte-parole du Gouvernement dit qu’il y aura un possible recours au 49.3 au menu du Conseil des ministres, où vous serez tout à l’heure en sortant de cette interview. Ce serait un échec, un 49.3 sur le budget ?
VALERIE LETARD
On n’a jamais recours au 49.3 avec plaisir quand on a envie de construire un budget avec les parlementaires. Je pense que le Premier ministre, d’emblée, il l’a dit : » Je veux coproduire mon budget avec le Parlement « . On est dans un nouveau contexte, en tout cas, c’est sa volonté fortement exprimée. Le budget est imparfait, certainement. Il est améliorable. Il l’a dit de nombreuses fois. Pour autant, avoir en Conseil des ministres une délibération qui permette de saisir le 49.3, si c’est nécessaire, plutôt que de le faire en catastrophe, excusez-moi, ça me paraît être une mesure nécessaire et de bon sens. Mais qui ne veut pas dire pour autant que le Premier ministre ne veut pas aller au bout des débats. Simplement, vous savez comme moi, vous savez tous, que c’est un outil qui nécessite d’être délibéré en Conseil des ministres.
JEROME CHAPUIS
C’est-à-dire qu’il peut y avoir un feu vert tout à l’heure, mais finalement, le Premier ministre ne l’utiliserait pas ?
VALERIE LETARD
En tout cas, il a cette possibilité. Ça ne veut pas dire pour autant qu’il sera utilisé. En tout cas, son souhait, c’est d’aller le plus loin possible dans les débats parlementaires. Après, vous pouvez avoir des incidents, vous pouvez avoir des blocages, des difficultés. C’est un outil comme un autre, mais franchement, pour en avoir débattu et l’avoir entendu à de nombreuses reprises, je le pense sincère quand il dit qu’il veut aller au bout des débats.
SAHLIA BRAKHLIA
Le débat parlementaire pendant lequel de nombreuses idées fleurissent, c’est le cas de la taxe d’habitation qui est revenue sur la table. Emmanuel MACRON l’a supprimée lors de son premier quinquennat, c’est un marqueur fort de son premier quinquennat. Certains, même des maires, des collectivités locales, disent que c’était une erreur. Il faut revenir dessus, il faut remettre la taxe d’habitation. Qu’est-ce que vous dites, vous ?
VALERIE LETARD
Moi, à titre personnel, pour mettre tout le monde à l’aise, moi, je n’étais pas favorable. Je suis une ancienne sénatrice, élue locale, forcément, la taxe d’habitation. Pour autant, la taxe d’habitation a été supprimée. On a bien vu qu’on a fait évoluer d’autres fiscalités. La taxe foncière…
SALHIA BRAKHLIA
La taxe foncière a explosé.
VALERIE LETARD
La question de la taxe d’habitation, après, c’est pareil, c’est un débat qui se construit avec un Parlement qui a aussi possibilité de faire des propositions.
SALHIA BRAKHLIA
Mais vous dites quoi au Gouvernement ?
VALERIE LETARD
Au Gouvernement, on est plutôt sur cibler spécifiquement les acteurs qui ont les moyens de contribuer et plutôt de façon temporaire. La taxe d’habitation, en fait, c’est revenir sur une nouvelle taxe puisque ce ne serait pas tout à fait la taxe d’habitation. Je pense qu’on considère qu’il faut plutôt agir sur des leviers fiscaux, déjà existants et voir comment les ajuster le cas échéant.
SALHIA BRAKHLIA
Donc, la taxe d’habitation sur les résidences secondaires qui, elle, est toujours présente, il faudrait l’augmenter ?
VALERIE LETARD
Alors là, très honnêtement, aujourd’hui, je ne suis pas capable de vous répondre là-dessus. Je pense que le chemin de la construction du budget, il est loin d’être terminé, des discussions et des propositions, il y en aura. En tout cas, aujourd’hui, moi, je peux vous dire que ce n’était pas dans le scope, ce n’est pas à l’ordre du jour. Et en même temps, ça ne veut pas dire qu’il n’y aura pas des discussions et des chemins là-dessus puisqu’on construit vraiment, avec le Parlement, les solutions pour faire passer un budget qui soit le plus partagé possible dans un contexte terriblement difficile.
SALHIA BRAKHLIA
Bon, un sujet qui relève directement de votre décision. Le Premier ministre a évoqué un aménagement des restrictions de location pour les logements classés G au 1er janvier 2025. Ça concerne environ 750 000 locations. Ça veut dire quoi, en fait, aménager les restrictions de location ? On rappelle que les logements classés G vont être interdits à la location le 1er janvier 2025.
VALERIE LETARD
Alors, ils vont être interdits à partir du 1er janvier 2025 et au changement de locataire, c’est-à-dire, si vous avez un contrat de location qui a été entamé avant le 1er janvier 2025, vous n’allez pas sortir votre locataire au 1er janvier 2025, c’est quand vous changez de locataire, avant de pouvoir relouer votre logement, vous devez le mettre aux normes énergétiques si vous êtes en passoire énergétique dans un logement indécent, puisque les classes G, c’est quand même ceux qui sont les plus énergivores et impactants pour les locataires, malgré tout, effectivement, il y a nécessité de se mettre en conformité avec des financements Ma Prime Rénov’ qui accompagnent les propriétaires qui sont assez significatifs.
JEROME CHAPUIS
Mais qui va être raboté cette année.
SALHIA BRAKHLIA
Raboté d’un 1,7 milliard quand même.
VALERIE LETARD
Alors, ça ne veut pas dire qu’on change les taux. Raboté de 1,7 milliard, il faut savoir que l’année dernière, on avait un budget qui a été sous-consommé de plus d’un milliard, c’est-à-dire qu’en fait, qu’est-ce que nous disent les acteurs ? Ils ne nous disent pas : » C’est l’enveloppe qui nous pose problème « , ça ne veut pas dire qu’on est satisfait. On fait un effort budgétaire, mais l’année dernière, on a sous-consommé l’enveloppe parce qu’on avait changé les normes. Qu’est-ce que nous demandaient les acteurs, tous les acteurs ? S’il vous plaît, ne changez plus les normes, laissez les monogestes, la rénovation globale, ne revenez pas à la situation du 1er janvier 2024.
SALHIA BRAKHLIA
En gros, c’était trop compliqué pour que les Français puissent y accéder ?
VALERIE LETARD
Ce qui a mis le système en difficulté, ce n’est pas l’enveloppe, c’est le cadre, c’est, on change les règles en milieu de parcours, les gens n’y comprennent plus rien. Ce que nous demandent, quand vous disiez stabilité, moi, ce que j’ai entendu quand j’ai reçu, je suis allé, j’ai rencontré la FFB, la CAPEB, tous les acteurs, très honnêtement : » S’il vous plaît, de la stabilité, ne changez plus les règles « .
SALHIA BRAKHLIA
Alors, sur le calendrier alors ?
JEROME CHAPUIS
Oui, sur le calendrier, parce que…
VALERIE LETARD
Sur les copropriétés, que se passe-t-il ? Effectivement, en s’appuyant sur un véhicule, sur une initiative parlementaire, parce qu’il faut aller vite, ce qu’on veut, c’est entamer, et parce que vraiment, moi, je suis convaincue que c’est avec les parlementaires qu’on cheminera, c’est travailler sur les copropriétés car effectivement, quand on est propriétaire, bailleur ou occupant dans une copro, on peut être de bonne foi, avoir voulu faire les travaux, et avoir des décisions de copro qui ne se prennent pas, qui ne sont pas votées, et vous êtres, vous vous retrouvez puni, alors que vous étiez de bonne foi et que vous vouliez contribuer…
SALHIA BRAKHLIA
Alors qu’est-ce qui va se passer pour les copros ?
VALERIE LETARD
… Donc des dispositions seront prises pour qu’en fonction des plans pluriannuels de travaux qui seront votés par les copros, d’autoriser les reports, le temps de la réalisation des travaux, quand vous êtes dans une copro de 600 logements…
JEROME CHAPUIS
Mais ça peut prendre des années !
VALERIE LETARD
Il y aura des limites temporelles qui seront mises dans le texte qui va être travaillé avec les parlementaires…
SALHIA BRAKHLIA
Comment être sûr que les copros vont faire les travaux comme promis ?
VALERIE LETARD
… Bien sûr qu’on ne va pas laisser faire n’importe quoi, n’importe comment, mais…
JEROME CHAPUIS
Parce que faire des travaux concrètement, ça va être de l’isolation par l’extérieur par exemple, ça peut prendre deux, trois, cinq ans.
VALERIE LETARD
L’idée, c’est de faire une temporalité qui soit suffisante pour faire des travaux ambitieux, mais on ne peut ni punir les gens, ni les dédouaner de faire l’effort. Et donc on sait, et c’est partagé par tous et c’est prouvé, qu’avec les copros, il faut faire cet effort.
JEROME CHAPUIS
Mais sur le calendrier, juste pour que ce soit bien précis…
VALERIE LETARD
… Le 1er janvier 2025.
SALHIA BRAKHLIA
Ça ne bouge pas pour tout le monde.
JEROME CHAPUIS
C’est sur toutes les copropriétés que je n’ai pas compris, pardon. Sur les copropriétés, le calendrier va être légèrement aménagé ?
VALERIE LETARD
Il ne sera pas, en fait, on prendra en compte la durée des travaux, il faudra qu’il y ait un plan pluriannuel de travaux qui soit voté, qui soit décidé, et qui permettra, mais ça va se construire dans le texte, donc je ne peux pas vous dire comment il va définitivement aboutir, mais sachez que l’idée, c’est de ne pas impacter des copropriétés, quand les gens, ils sont de bonne foi, et quand l’engagement est parti, mais qu’objectivement, la faisabilité des travaux n’est pas atteignable dans les délais impartis.
SALHIA BRAKHLIA
Valérie LETARD, 2,7 millions de ménages sont en attente d’un logement social, un chiffre qui ne cesse de grimper. Aujourd’hui, il y a la loi SRU qui oblige les communes à construire 20 à 25% d’HLM. Dans certaines communes, on est loin de ce taux de 20 à 25%. Alors, le gouvernement précédent, votre prédécesseur, voulait inclure les logements intermédiaires dans ce quota obligatoire. Je vous vois faire un peu la moue, mais en fait, ce n’est pas votre but, vous n’allez pas le faire, ça ?
VALERIE LETARD
Moi, je pense qu’il faut agir sur tous les leviers. Je pense que, sur la loi SRU, d’abord, le Parlement d’hier n’est pas le Parlement d’aujourd’hui. Je pense que c’est la première chose. Alors, on peut vouloir déposer un texte de loi, mais je pense que s’il y a bien un sujet sur lequel, dans l’Assemblée d’aujourd’hui, les discussions et les points de vue sont très divers, je pense qu’il faut regarder, effectivement, comment on peut cheminer. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas des choses à faire sur l’article 55, mais je pense qu’aujourd’hui, sur cette question, avant de faire quoi que ce soit, il faut consulter, et il ne vous a pas échappé, que je vois énormément de parlementaires, énormément d’acteurs, parce que je suis convaincue que la voie, on doit la trouver. S’il y a un sujet qui peut faire conscience et qui se construit avec le Parlement, c’est bien le logement. Et là-dessus.
SALHIA BRAKHLIA
Non, mais d’accord, mais sur les logements sociaux, le discours de votre prédécesseur, il était simple : « Ceux qui n’ont plus rien à faire dans les logements sociaux doivent partir ». Est-ce que vous êtes toujours dans cette logique-là ? Est-ce qu’il faut faire le tri, revoir les revenus de ceux qui habitent dans les logements sociaux ?
VALERIE LETARD
Je pense qu’on doit faire des efforts parce que les attributions de logements. Quand vous avez peu de logements sociaux, il faut faire attention effectivement à la façon dont on attribue le plus de la façon la plus efficiente les logements. Quand vous avez de la sous-occupation, comment on peut faire en sorte qu’il y ait des mutations qui soient facilitées d’une personne qui occupe un type quatre alors qu’elle est seule. Il faut pouvoir avancer sur ces questions. Je suis, j’ai une fibre sociale fort, donc je suis complètement convaincue qu’il faut avancer parce que chacun doit faire des efforts, mais en tout cas, je le ferai avec mesure et je le ferai après avoir pris la température de tous les groupes politiques et de le construire avec les parlementaires. Mais en tout cas, il faut cheminer sur la loi SRU. Il existe des contrats de mixité sociale, par exemple aujourd’hui, qui sont sous utilisés. Moi, j’encouragerais les préfets à, en tout cas, actionner les leviers dont on dispose déjà. Pour aider les collectivités qui sont en difficulté par rapport à l’article 55. Et après, il y a certainement des adaptations à faire. On va voir ce qui est possible et ce qui est possible dans le cadre parlementaire qui est le nôtre aujourd’hui.
JEROME CHAPUIS
Valérie LETARD, un autre levier. L’immobilier de bureaux s’effondre. En Île-de-France, on compte cinq millions de mètres carrés de bureaux vides, chiffre d’IMMOSTAT fin septembre 2024. Est-ce qu’il faut encourager la reconversion des bureaux en logements ?
VALERIE LETARD
Oui, bien sûr.
JEROME CHAPUIS
Et comment.
VALERIE LETARD
Mais complètement. Et là aussi, moi vous savez, je suis une ancienne parlementaire. Je crois beaucoup au travail avec le Parlement. Vous avez des initiatives parlementaires, monsieur DAUBIAS apportait une proposition de loi qui, au stade de la commission mixte paritaire et qui a été, enfin, voilà.
SALHIA BRAKHLIA
Attendez…
VALERIE LETARD
Le changement, vous disiez changement de Gouvernement. Enfin voilà…
JEROME CHAPUIS
Il n’y a plus qu’à se mettre d’accord.
VALERIE LETARD
Il faut la remettre en route et essayer de débloquer, y compris les petites dispositions fiscales qui sont des petites dispositions qui permettraient d’encourager et d’accompagner. On a des centaines de milliers de bureaux vacants. Beaucoup se trouvent dans des zones denses où par exemple, on pourrait très bien imaginer, eh bien, de requalifier ces bureaux vacants en logements étudiant. On ne trouve plus de logement étudiant.
SALHIA BRAKHLIA
Oui
VALERIE LETARD
Et il y a des opportunités d’en même temps de traiter une question qui est quand même massive. On n’a plus de foncier. On a des immeubles qui sont en train de se vider. On a des besoins de logements étudiant.
JEROME CHAPUIS
Des logements dans les tours de la défense. Ça ne se fait pas comme ça.
VALERIE LETARD
Mais non, mais il n’empêche que si on met des dispositions, en fait, il y a des. Il y a encore une fois. Le texte, il va permettre des ajustements sur le code de l’urbanisme, sur le code de l’habitation, des choses qui vont permettre de débloquer…
SALHIA BRAKHLIA
Qui vont obliger.
VALERIE LETARD
Tout ça. Et des dispositions aussi d’incitation qui permettront d’avancer parce que vraiment ne pas. Ce sont des centaines de milliers de mètres carrés qui aujourd’hui sont disponibles dans des endroits où on a besoin de logements. Comment on fait. C’est un chantier qui est devant nous et ça pourrait répondre à plusieurs problématiques qui nous occupent.
SALHIA BRAKHLIA
Rapide question avec une rapide réponse si vous y parvenez. La question d’AIRBNB qui dérange tous les maires désormais, tout le monde.
VALERIE LETARD
Même chose. Quand on a la chance d’avoir des initiatives parlementaires. Madame Le MEUR et Monsieur ECHANIZ avaient porté un texte qui justement traite de cette question des meublés touristiques et donne des outils aux maires pour pouvoir réguler sur leur territoire. Figurez-vous qu’on a fortement poussé, en tout cas, mon ministère a fortement poussé qu’on puisse réinscrire ce texte à l’ordre du jour du Parlement très vite.
SALHIA BRAKHLIA
Le but, c’est de réduire la niche fiscale qui est liée aux meublés touristiques.
VALERIE LETARD
C’est de faire en sorte que les maires aient des outils, réduire les niches fiscales, mais donner des outils aux maires pour mieux maîtriser le meublé touristique courte durée, parce que sinon on.
SALHIA BRAKHLIA
En allant jusqu’aux quotas selon les villes, l’interdiction dans certains quartiers.
VALERIE LETARD
Mais écoutez, ça fait partie des dispositions qui sont présentes dans ce texte.
SALHIA BRAKHLIA
Et vous êtes pour.
VALERIE LETARD
Moi, je pense qu’il faut donner les outils au maire pour le faire et après à eux de l’utiliser avec mesure, parcimonie. Je pense que les maires sont tout à fait conscients, mais en tout cas, cette mesure, très vite, elle arrivera avant la fin de l’année.
JEROME CHAPUIS
Valérie LETARD, ministre du Logement. Vous étiez l’invité de 8 h 30 France Info. Merci d’avoir été avec nous
VALERIE LETARD
Merci beaucoup.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 24 octobre 2024