MARTINIQUE. Observatoire des communes 2024 : état des finances et capacités d’investissement

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finances locales Martinique

113 % : C’est l’augmentation spectaculaire des investissements des communes en 2023. Pourtant, malgré cette embellie, les collectivités locales martiniquaises peinent encore à financer leurs projets d’envergure. L’Observatoire des communes de Martinique 2024, publié par l’Agence Française de Développement (AFD), livre un état des lieux détaillé des finances locales et des capacités d’investissement des collectivités.

Si les recettes fiscales progressent, les communes font face à des dépenses de fonctionnement élevées, réduisant leur marge de manœuvre pour financer des infrastructures stratégiques. Ce rapport met en lumière les forces et les faiblesses du modèle économique local.

Les communes en 2023 : des finances en meilleure santé, mais un effort d’investissement limité

L’année 2023 a marqué un tournant pour les communes martiniquaises. Après plusieurs exercices tendus, elles ont retrouvé une épargne positive, portée par des recettes fiscales en hausse (+6 %).

En tête, l’octroi de mer, qui représente près de 50 % des ressources fiscales locales. Cette dynamique est un signal encourageant, car elle permet aux communes de disposer de marges budgétaires pour financer leurs services et infrastructures.

Cependant, une lecture plus fine du rapport révèle une structure budgétaire encore déséquilibrée. En effet, plus de 60 % du budget communal est absorbé par les frais de personnel, une charge incompressible qui limite drastiquement la capacité des collectivités à dégager des fonds pour des projets structurants. Ce poids s’explique par les règles statutaires encadrant la fonction publique territoriale et par la nécessité d’assurer des services de proximité.

Toutefois, il pose une question centrale : comment financer les infrastructures nécessaires au développement du territoire avec une telle rigidité budgétaire ?

Chiffre marquant : 330 millions d’euros de dette communale, mais une capacité de remboursement en baisse à 6 ans (seuil d’alerte : 9 ans).

 

Un poids fiscal majeur : la dépendance à l’octroi de mer

En Martinique, l’octroi de mer est bien plus qu’une taxe : c’est l’oxygène financier des communes.

Introduite pour compenser les handicaps structurels des territoires ultramarins, cette taxe sur les importations génère 667 €/habitant en Martinique, un chiffre supérieur à celui de la Guadeloupe (617 €/hab) et de la Guyane (484 €/hab).

Elle finance directement les services publics locaux et représente près de 50 % des recettes fiscales des communes.

Toutefois, cette dépendance pose problème. En effet, toute réforme ou diminution des importations pourrait mettre en péril l’équilibre financier des collectivités. Or, plusieurs tendances laissent penser que cette ressource pourrait être fragilisée à moyen terme :

  • Des pressions de l’Union européenne pour réduire les exemptions fiscales accordées aux Outre-mer.
  • Une volonté croissante de relocalisation économique qui pourrait réduire le volume des importations.
  • Une dépendance aux dynamiques du commerce international, rendant les recettes instables.

Face à ces risques, diversifier les ressources fiscales des collectivités devient une priorité pour garantir la pérennité des services publics locaux.

Chiffre marquant : L’octroi de mer représente près de 50 % des recettes fiscales locales.

 

Des disparités entre les communes : toutes ne sont pas égales face aux finances

Si les finances globales s’améliorent, toutes les communes ne bénéficient pas du même dynamisme. Certaines, mieux dotées fiscalement, disposent de marges de manœuvre plus importantes. D’autres, plus dépendantes des dotations de l’État, peinent à dégager des ressources suffisantes pour investir.

Le rapport met en évidence des écarts importants entre les communes du nord de la Martinique et celles du centre et du sud :

  • Les communes du nord sont souvent plus endettées et ont un potentiel fiscal plus faible, ce qui les rend plus dépendantes des aides de l’État.
  • Les communes du centre et du sud, où l’activité économique est plus dynamique, affichent des finances plus solides et une meilleure capacité d’investissement.

Ces disparités soulignent l’importance de politiques de péréquation financière permettant d’équilibrer les ressources entre territoires et d’éviter une fracture territoriale au sein de la Martinique.

Chiffre marquant : Les communes du nord de la Martinique affichent des niveaux d’endettement plus élevés que celles du centre et du sud.

 

Une gestion des dépenses de personnel qui pèse sur les finances locales

Avec plus de 60 % du budget consacré aux frais de personnel, les communes martiniquaises se retrouvent avec une marge de manœuvre limitée pour investir.

Cette contrainte est structurelle : les collectivités locales ont des obligations légales en matière de rémunération et de protection des agents territoriaux, ce qui rend difficile toute réduction significative de cette charge.

À titre de comparaison, voici les montants des frais de personnel par habitant en 2023 :

  • Martinique : 1 043 €/hab
  • Guadeloupe : 1 113 €/hab
  • Guyane : 792 €/hab

Cette rigidité budgétaire complexifie la gestion financière des communes, qui doivent trouver des solutions pour maintenir un haut niveau de service public sans compromettre leurs capacités d’investissement.

Chiffre marquant : Les frais de personnel en Martinique s’élèvent à 1 043 €/habitant, contre 1 113 €/hab en Guadeloupe et 792 €/hab en Guyane.


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Consulter L’Observatoire des communes de Martinique 2024 ici.


 

Ce qu’il faut retenir pour la suite

  • Les finances locales s’améliorent, mais l’investissement reste encore en deçà des attentes.
  • Les EPCI doivent jouer un rôle plus fort en matière de développement territorial, notamment en accélérant la modernisation des infrastructures et la gestion des services publics.
  • Les collectivités doivent trouver des leviers pour investir davantage, sans compromettre leur équilibre budgétaire. Cela implique une optimisation des dépenses de fonctionnement, une meilleure mobilisation des aides de l’État et des stratégies innovantes pour renforcer les recettes locales.
  • L’enjeu est aussi politique : les élus doivent concilier rigueur budgétaire et nécessité d’investir dans des projets porteurs pour l’avenir.

L’Observatoire 2024 montre une tendance positive, mais les collectivités doivent encore accélérer la cadence pour transformer ces gains budgétaires en projets concrets, capables de répondre aux besoins du territoire.

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