COP29 : un sommet marqué par des échecs sur les émissions et les financements

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    COP29
    (c)COP29/Media Gallery

    La COP29, tenue à Bakou, était présentée comme une opportunité majeure pour renforcer les engagements climatiques.

    Pourtant, les résultats obtenus reflètent une déconnexion entre les attentes des pays vulnérables et les décisions des pays développés. Si certaines avancées administratives, comme sur les marchés carbone, ont été réalisées, elles sont éclipsées par des échecs retentissants.

    Les principaux objectifs, notamment sur l’atténuation, les financements climatiques et les droits humains, ont été soit minimisés, soit reportés à des négociations futures.

    Ces manques laissent planer un doute sur la capacité des COP à répondre à l’urgence climatique. Comme l’a souligné François Gemenne, coauteur du 6e rapport du GIEC, « On pouvait s’attendre a minima à une reprise des termes de la COP28. Nous n’avons même pas obtenu cela.« 

    Marchés carbone : une victoire à demi-teinte

    Un accord après 9 ans de négociations, mais des lacunes persistantes

    L’un des rares accomplissements de la COP29 est l’adoption des règles pour le marché international des crédits carbone, prévu par l’article 6.4 de l’Accord de Paris. Cet outil, supervisé par l’ONU, permet aux États et aux entreprises de compenser leurs émissions en investissant dans des projets écologiques dans d’autres pays. Après 9 ans de négociations, ce cadre est enfin opérationnel.

    Cependant, cet accord est loin d’être parfait. Les spécialistes pointent des failles importantes.

    Isa Mulder, experte de Carbon Market Watch, critique : « Les défauts de l’article 6 n’ont malheureusement pas été corrigés. Les pays ont préféré adopter des règles insuffisantes et gérer les conséquences plus tard. » L’intégrité des crédits carbone reste un problème majeur.

    Certains craignent que ces mécanismes servent davantage à masquer des émissions qu’à les réduire.

    En chiffres, ce marché pourrait générer des milliards de dollars pour les pays en développement, mais sans garanties solides contre les abus, ces fonds risquent de ne pas avoir l’impact attendu sur la transition écologique.

    Financements climatiques : des promesses loin des attentes

    300 milliards par an, une somme jugée insuffisante par le Sud

    Le financement climatique, un sujet central de la COP29, illustre les tensions persistantes entre pays du Nord et du Sud. Les pays développés se sont engagés à mobiliser 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 pour aider les pays en développement à faire face aux impacts du changement climatique.

    Mais cet accord, bien qu’historique par son montant, est perçu comme largement insuffisant.

    Les besoins réels, estimés à 1 300 milliards de dollars par an, laissent un fossé de 1 000 milliards à combler. De plus, la nature des financements (prêts ou dons) reste floue, ce qui suscite des inquiétudes dans des régions déjà endettées.

    Un autre point de discorde réside dans le contrôle des fonds. Les pays du Nord souhaitent garantir que ces financements soient utilisés exclusivement pour la transition climatique.

    De leur côté, les pays du Sud estiment que cet argent leur est dû sans condition, car ils subissent des dommages dont ils ne sont pas responsables.

    Émissions : des objectifs abandonnés

    Aucun accord sur la sortie des énergies fossiles

    Les discussions autour de la réduction des émissions ont été l’un des échecs majeurs de la COP29. Le programme de travail sur l’atténuation, lancé à la COP27, devait concrétiser des engagements pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

    Au lieu de cela, les négociations se sont enlisées.

    Sous l’impulsion de l’Arabie saoudite et du groupe arabe, toute mention de la sortie progressive des énergies fossiles a été bloquée. Pire encore, la mention de l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C , pourtant acté lors de la COP21 à Paris, a été supprimée des textes finaux.

    Le rejet du bilan mondial (Global Stocktake), un outil censé mesurer les progrès des pays par rapport aux objectifs climatiques, ajoute à ce constat d’échec. Les discussions ont été repoussées à l’intersession de Bonn en juin 2025, laissant un vide inquiétant alors que la fenêtre pour agir se referme rapidement.

    Inclusion et droits humains : un débat au point mort

    Le genre et la diversité, oubliés des discussions

    La COP29 devait également progresser sur les enjeux de genre et de diversité, notamment à travers le renouvellement du programme de travail genre de Lima. Ce programme a été reconduit pour 10 ans, contre cinq auparavant.

    Cependant, les avancées s’arrêtent là.

    Sous pression des pays conservateurs, comme la Russie et les pays du Golfe, des termes clés ont été supprimés des textes finaux, notamment « diversité de genre » et « intersectionnalité« . Ces concepts étaient essentiels pour reconnaître les discriminations multiples subies par certaines populations.

    Anne Barre, de Women Engage for a Common Future, s’inquiète : « Supprimer ces termes montre un recul inquiétant sur les droits fondamentaux. »

    Bien que la mention des droits humains ait été maintenue, elle reste symbolique face aux reculs observés dans d’autres aspects.

    La COP30, dernière chance ?

    Un sommet crucial pour redéfinir l’ambition climatique

    Alors que la COP29 s’achève sur un bilan critique, la COP30, prévue à Belém, au Brésil, est attendue comme une opportunité de rattrapage.

    Prévue pour coïncider avec les 10 ans de l’Accord de Paris, elle devra répondre à des enjeux complexes, comme la déforestation et la préparation du deuxième bilan mondial.

    Mais les défis sont nombreux. Le retour de Donald Trump aux États-Unis, qui pourrait remettre en question l’engagement de la première économie mondiale, et les divisions Nord-Sud persistantes, risquent de compliquer les discussions.

    Le président brésilien Lula a annoncé que la COP30 serait « le tournant« , mais pour cela, un changement profond des dynamiques de négociation sera nécessaire.

    La COP29 aura illustré une fois de plus les limites des négociations climatiques internationales.

    Si quelques avancées ont été réalisées, elles restent bien en deçà des attentes. Les financements insuffisants, les échecs sur les émissions, et les blocages politiques montrent l’urgence de réinventer ces rendez-vous.

    La COP30 sera-t-elle le « tournant » attendu ou un nouvel échec ? La réponse dépendra de la capacité des États à dépasser leurs intérêts nationaux pour enfin répondre à la crise climatique globale.

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