La charpente industrialisée en bois, appelée aussi fermette, est devenue incontournable dans la construction contemporaine grâce à son efficacité, son coût réduit et sa simplicité de mise en œuvre.
Pourtant, malgré ses nombreux avantages, elle reste une source fréquente de sinistres lorsqu’elle est mal conçue, posée ou réceptionnée. Flambement, instabilité structurelle ou dégradations prématurées peuvent compromettre la qualité et la sécurité de vos projets.
À travers cet article, nous vous présentons 5 erreurs récurrentes dans la mise en œuvre des charpentes industrialisées, en vous proposant des solutions concrètes pour chaque situation. Suivez ces bonnes pratiques pour garantir des ouvrages durables et conformes aux normes.
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1. Mauvaise conception ou négligence des spécificités du projet
L’erreur :
Une conception générique ou peu adaptée aux contraintes spécifiques du projet. Par exemple, ignorer les charges de vent, neige ou sismicité peut conduire à des déformations ou à un effondrement partiel.
Les conséquences :
Lorsque les fermes ne sont pas dimensionnées pour supporter les efforts auxquels elles sont soumises, les défaillances structurelles sont quasi inévitables. Le flambement des pièces comprimées ou des ancrages insuffisants peut entraîner des coûts de réparation élevés.
La solution :
- Étude préalable rigoureuse : Collaborez étroitement avec un bureau d’études qualifié dès les premières étapes. Fournissez des données précises sur les charges attendues, les contraintes climatiques et les particularités du projet.
- Exemple concret : Dans une région exposée aux vents violents (comme les zones littorales), ne pas inclure de contreventement longitudinal peut causer un basculement des fermes, entraînant une déformation de l’ensemble de la toiture.
- Astuce : Prévoir des calculs spécifiques pour les projets atypiques, comme les toitures à forte pente ou les bâtiments en zone sismique.
2. Oublier les dispositifs d’antiflambement
L’erreur :
Ne pas inclure ou mal installer les dispositifs d’antiflambement. Ces éléments sont essentiels pour empêcher les pièces comprimées, comme les arbalétriers, de se déformer hors de leur plan sous l’effet des charges.
Les conséquences :
Sans antiflambement, les fermes perdent leur stabilité. Ce phénomène, appelé flambement, peut s’amplifier rapidement et causer des désordres sur toute la structure de la charpente.
La solution :
- Conception et pose rigoureuses : Considérez les dispositifs d’antiflambement comme indissociables des fermes. Étudiez leur emplacement et leur fixation sur des points rigides dès la conception.
- Exemple concret : Pour une toiture avec de fortes charges de neige, un antiflambement continu (type A) doit être préféré pour maintenir la rigidité des arbalétriers. Les feuillards mal tendus ou mal cloués peuvent causer des déformations localisées.
- Bonnes pratiques : Respectez les angles de pose (45° typiquement) et utilisez des pièces adaptées (poutres, lisses, feuillards). Formez les poseurs à ces techniques pour garantir une mise en œuvre correcte.
3. Mauvaise réception des pièces sur chantier
L’erreur :
Recevoir des éléments endommagés, incomplets ou mal stockés. Ne pas vérifier que toutes les pièces correspondent au plan de pose.
Les conséquences :
Les erreurs détectées tardivement provoquent des retards, des ajustements coûteux ou une qualité d’exécution dégradée. De plus, un stockage inapproprié peut entraîner des déformations irréversibles des fermes.
La solution :
- Vérification systématique : Comparez chaque pièce avec le bordereau de livraison et le plan de pose. Assurez-vous que toutes les pièces sont marquées CE (conformité à la norme NF EN 14250).
- Exemple concret : Une entreprise a reçu des fermes non conformes (entraxe incorrect), entraînant un chantier arrêté et des retards significatifs.
- Bonnes pratiques de stockage : Stockez les fermes en position quasi verticale contre un support stable ou horizontalement sur une surface plane avec des chevrons espacés de 3 mètres maximum. Protégez-les de la pluie tout en permettant une bonne ventilation.
4. Poser sans respecter les règles de l’art
L’erreur :
Fixations mal réalisées, non-respect des tolérances géométriques (aplomb, entraxe), ou improvisations lors de la pose.
Les conséquences :
Des tolérances non respectées (par exemple, un aplomb incorrect ou des entraxes hors normes) peuvent provoquer des contraintes excessives sur les éléments, entraînant des déformations ou des fissures.
La solution :
- Normes et tolérances : Respectez scrupuleusement les normes du DTU 31.3 et de l’Eurocode 5. Les tolérances pour l’aplomb des fermes, par exemple, doivent rester inférieures à 1/200 de leur hauteur ou à la demi-épaisseur de la ferme.
- Exemple concret : Une entreprise a improvisé une fixation avec des pointes classiques pour une charpente dans une région sismique, entraînant des désordres structurels après un léger tremblement de terre.
- Responsabilité partagée : Assurez-vous que chaque intervenant (architecte, fabricant, poseur) respecte les règles de l’art. Le plan de pose doit être le document de référence pour toute l’équipe.
5. Improvisations autour des particularités de l’ouvrage
L’erreur :
Ne pas planifier les particularités structurelles (lucarnes, cheminées, trémies) et improviser leur intégration sur le chantier.
Les conséquences :
Ces aménagements modifient la répartition des charges sur les fermes voisines. Sans renforcement préalable, cela peut causer des déformations, voire des ruptures locales.
La solution :
- Préparation en amont : Planifiez ces éléments dès la conception en collaboration avec le bureau d’études et le fabricant.
- Exemple concret : Une trémie non renforcée pour une cheminée a provoqué des fissures dans les murs porteurs, nécessitant un renfort coûteux après coup.
- Recommandations spécifiques : Ajoutez des chevêtres sous les trémies ou installez des poutres longitudinales pour reprendre les efforts supplémentaires, comme recommandé dans le guide.
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Ces cinq erreurs sont fréquentes, mais elles peuvent être facilement évitées avec une préparation rigoureuse et un respect strict des bonnes pratiques.
Le Guide technique de la charpente industrialisée en bois est un outil précieux pour vous accompagner dans cette démarche.
Prenez le temps de bien concevoir, poser et réceptionner vos charpentes pour garantir la sécurité et la satisfaction de vos clients.
Source : Troisième édition (2024) du guide technique « La charpente industrialisée en bois » du CODIFAB.