L’ADEME a publié une synthèse consacrée à l’autonomie énergétique de la Guadeloupe à l’horizon 2050. Cette étude prospective porte sur un territoire classé en zone non interconnectée (ZNI), dont l’approvisionnement électrique repose exclusivement sur des moyens de production locaux.
L’objectif affiché est d’évaluer, à partir de scénarios contrastés, les implications techniques, organisationnelles et économiques d’un système électrique très fortement renouvelable, sans se substituer aux exercices de planification énergétique menés dans le cadre des programmations pluriannuelles de l’énergie (PPE).
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Pourquoi l’ADEME revoit l’horizon à 2050
Cette nouvelle étude s’inscrit dans la continuité de travaux publiés en 2018, qui concluaient déjà à la faisabilité d’un mix électrique 100 % renouvelable local en Guadeloupe, sous certaines conditions. L’ADEME a toutefois identifié plusieurs limites méthodologiques dans ces premiers travaux, notamment concernant la prise en compte des données météorologiques, la reconstitution de la demande électrique et la traçabilité des potentiels d’énergies renouvelables mobilisés.
Le choix de repousser l’horizon d’analyse à 2050 vise à tenir compte des dynamiques de déploiement réalistes des différentes filières, de l’intégration de nouveaux usages, dont la mobilité électrique, et de l’émergence de technologies supplémentaires. La synthèse précise que cet exercice n’a pas vocation à fixer un objectif réglementaire, mais à tester des trajectoires crédibles à long terme.
Une modélisation renforcée pour tester la faisabilité
La méthodologie repose sur une chaîne de modélisation complète. La simulation est réalisée à pas de temps horaire jusqu’en 2050, en intégrant plusieurs années météorologiques afin de tester la robustesse du système face à la variabilité climatique.
L’étude mobilise l’outil d’optimisation ETEM-GR, un outil de dispatch de type ANTARES et un modèle électrotechnique PowerFactory pour valider le fonctionnement du réseau.
Cette approche permet d’analyser non seulement les capacités de production nécessaires, mais aussi les conditions de fonctionnement du système électrique, notamment en matière d’équilibre offre-demande, de gestion des pointes et de stabilité du réseau dans un contexte de forte pénétration des énergies renouvelables variables.

Quatre scénarios pour explorer des trajectoires contrastées
Quatre scénarios prospectifs sont étudiés :
- Deux visent un système électrique 100 % renouvelable, avec des potentiels qualifiés de « favorables » ou « élargis ».
- Deux autres poursuivent explicitement un objectif d’autonomie énergétique, également avec des potentiels élargis, dont un scénario dit « optimal ».
Ces scénarios diffèrent par l’accès aux ressources, le recours à certaines filières comme l’éolien offshore, le dimensionnement du stockage et le niveau d’autonomie recherché.
Ils permettent de comparer des trajectoires sans hiérarchisation normative, l’ADEME précisant qu’aucun scénario n’est présenté comme une trajectoire à suivre.
Les enseignements techniques majeurs
Les résultats montrent que le photovoltaïque constitue un pilier central du mix électrique futur, avec des capacités installées pouvant atteindre jusqu’à 1 008 MW selon les scénarios. Les autres filières — éolien terrestre et offshore, géothermie, biomasse locale et houlomoteur — jouent un rôle complémentaire dans l’équilibre du système.
L’étude met surtout en évidence le rôle structurant du stockage. Celui-ci est mobilisé principalement pour l’équilibrage journalier et infra-journalier du système, afin de compenser la variabilité des productions renouvelables et de sécuriser l’alimentation lors des périodes de forte demande ou de faible production. La question de l’autonomie énergétique ne se résume donc pas à un enjeu de capacités installées, mais à un pilotage fin du système électrique.
Malgré une forte part d’énergies renouvelables variables, les simulations montrent que, pour l’ensemble des scénarios, le système respecte le critère de défaillance inférieur à 3 heures/an en moyenne sur 10 ans. Ce résultat constitue un point clé de l’étude, en démontrant que la sûreté d’alimentation peut être maintenue dans un système fortement renouvelable, sous réserve des conditions modélisées .

— Capacités ENR installées en 2050 et taux d’exploitation des potentiels éligibles par scénario
Des trajectoires économiques différenciées
Le document présente une analyse économique comparant les scénarios en termes d’investissements cumulés, de coûts complets de production et de coûts marginaux. Les résultats montrent des écarts sensibles selon les choix technologiques et le niveau d’autonomie recherché.
Les ordres de grandeur mis en avant confirment que l’autonomie énergétique est techniquement atteignable, mais qu’elle implique des investissements significatifs et des arbitrages structurants à long terme. L’ADEME souligne que ces résultats restent dépendants des hypothèses retenues, notamment en matière de coûts des technologies et de disponibilité des ressources.
Des limites clairement posées par l’étude
La synthèse insiste sur le caractère prospectif de l’exercice. Les résultats présentés n’engagent que l’ADEME et ne constituent ni une feuille de route opérationnelle ni une décision de politique publique. L’étude ne traite pas des questions d’acceptabilité sociale, de foncier ou de gouvernance, et n’intègre pas certains effets indirects, notamment dans le secteur des transports.
Ces limites sont explicitement rappelées afin d’éviter toute lecture prescriptive des scénarios étudiés.

Consulter ici la synthèse de : Vers l’autonomie énergétique en zone non interconnectée (ZNI) à la Guadeloupe à l’horizon 2050









