OUTRE-MER. une économie secouée mais résistante, que révèle le rapport 2024 de l’IEDOM ?

    0

    Le climat économique des Outre-mer en 2024 n’aura laissé que peu de répit. Cyclones à répétition, tensions sociales en Martinique, incertitudes géopolitiques internationales… l’année fut rude. C’est dans ce contexte que l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (IEDOM) publie son rapport annuel, livrant une photographie dense mais éclairante de la situation économique dans ses territoires d’intervention.

    Avec pour thème central « Mer et connexions maritimes », l’édition 2024 met en lumière le rôle structurant des infrastructures portuaires pour l’économie des DCOM. Mais au-delà de ce fil rouge, le document revient surtout sur les grands équilibres monétaires et bancaires à l’échelle ultramarine. Voici les faits saillants.

    L’inflation reflue, mais l’énergie reste une source de tension

    La bonne nouvelle de l’année vient sans doute de là. Après deux exercices fortement marqués par la hausse des prix, l’inflation a nettement ralenti dans les départements et collectivités d’outre-mer.

    En Guadeloupe, Guyane, Martinique ou encore à Saint-Martin, elle s’établit autour ou en dessous des 2 %, objectif cible de la Banque centrale européenne. Deux exceptions notables : Mayotte (+2,4 %) et Saint-Pierre-et-Miquelon (+2,3 %).

    Ce reflux s’explique notamment par la modération des prix alimentaires, même si ceux-ci restent dynamiques comparés à l’Hexagone.

    « La bataille de l’inflation est en passe d’être gagnée », note le rapport, qui évoque une « dynamique suffisamment robuste » pour entrevoir une stabilisation durable.

    Mais toutes les tensions ne sont pas dissipées. Les coûts de l’énergie restent orientés à la hausse dans presque tous les territoires, à l’exception de La Réunion où une baisse de -0,5 % a été observée. Une pression persistante qui continue d’alimenter l’inquiétude dans les foyers comme dans les entreprises.

    Crédit : des signaux contrastés

    Côté financement, l’activité de crédit a continué de croître en 2024, mais de façon hétérogène. L’encours total dans les DCOM atteint 61,9 milliards d’euros, en hausse de +3 % sur un an.

    Les établissements non installés localement tirent la dynamique (+10,1 %), tandis que les banques locales peinent à retrouver leur vigueur (+0,6 %).

    Dans le détail, ce sont surtout les crédits à l’investissement qui soutiennent l’activité, portés par les besoins en modernisation des outils de production. Les crédits immobiliers progressent lentement (+0,5 %), tandis que les crédits d’exploitation reculent nettement (-3,6 %).

    Le rapport souligne que « l’activité de crédit trouve un peu d’élan du côté des entreprises, stimulée par les crédits d’investissement, après une quasi-stabilité en 2023 ».

    Toutefois, les disparités régionales restent fortes. Le bassin Atlantique affiche une croissance modérée, quand La Réunion et Mayotte enregistrent un léger recul.

    Ménages : fragilité persistante et recours au crédit encadré

    Sur le front des ménages, les données traduisent une prudence généralisée. Si l’encours de crédits progresse de manière modérée, les dépôts à vue reculent (-2,3 %), au profit des placements liquides ou à court terme, perçus comme plus rémunérateurs. Le rapport met en évidence une baisse plus marquée chez les entreprises (-4,2 %) que chez les ménages (-1,8 %).

    Autre indicateur de tension : le nombre de dossiers de surendettement traités par l’IEDOM bondit à 3 249 en 2024, soit une « forte hausse » par rapport à l’année précédente. Ce chiffre, combiné à des taux de découverts très élevés (jusqu’à 16,6 % à La Réunion), laisse entrevoir des poches de vulnérabilité.

    Sur le crédit à l’habitat, les taux se stabilisent progressivement, mais restent plus élevés qu’en métropole. En octobre 2024, ils s’élevaient en moyenne à 3,49 % en Guadeloupe, 3,58 % à La Réunion, contre 3,45 % en France entière. Pour les prêts à la consommation, les écarts s’amenuisent, mais demeurent significatifs.

    « Les taux des crédits aux particuliers appliqués dans les Outre-mer sont supérieurs à ceux de la France entière. »

    Une action stabilisatrice, malgré les secousses

    Dans cet environnement chahuté, l’IEDOM a poursuivi ses missions au service de la stabilité financière et de l’inclusion économique. En 2024 :

    • 300 millions de billets ont été versés par ses guichets ;
    • 284 millions de billets ont été triés dans le cadre du recyclage fiduciaire ;
    • 9 500 entreprises ont été cotées ;
    • 6 130 personnes ont été sensibilisées à la gestion financière dans le cadre du programme EDUCFI.

    L’Institut a aussi renforcé sa présence locale à travers des actions de place, des réunions avec les banques (comme en Martinique face à la crise sociale), ou encore des ateliers sur les risques climatiques, comme à La Réunion.


    Consulter ici le rapport d’activité 2024 de l’IEDOM


    « 2024, annus horribilis, a confirmé la nécessité d’une transformation économique en profondeur des territoires français d’outre-mer. » Cette phrase du président de l’IEDOM, Ivan Odonnat, résume l’esprit du rapport : reconnaître la résilience des territoires face aux crises, mais alerter sur l’urgence d’une action structurelle de long terme.

    LAISSER UN COMMENTAIRE

    S'il vous plaît entrez votre commentaire!
    S'il vous plaît entrez votre nom ici