OUTRE-MER. Des besoins élevés, mais une faible part des aides MaPrimeAdapt’

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MaPrimeAdapt’

Avec plus de 15 000 logements engagés à mi-année, le dispositif MaPrimeAdapt’ progresse rapidement. Mais l’analyse fine des données révèle des déséquilibres notables dans la répartition des aides, notamment dans les territoires ultramarins.

Une dynamique nationale bien enclenchée

Lancée pour favoriser l’adaptation des logements à la perte d’autonomie, MaPrimeAdapt’ affiche une belle progression au premier semestre 2025. Entre janvier et juin, 15 222 logements ont été engagés, soit un tiers de l’objectif annuel de 45 000 fixé par l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Une montée en puissance nette, comparée à la courbe plus progressive de 2024.

Les ménages très modestes représentent 33 % des dossiers, devant les ménages modestes (18 %) et une part non négligeable de foyers aux revenus intermédiaires ou supérieurs. Un signe d’élargissement du public cible ? Peut-être. Mais cette évolution pose aussi une question de fond : les plus précaires sont-ils toujours les premiers bénéficiaires ?

Le profil des bénéficiaires : une cible relativement homogène

Dans les faits, les interventions concernent à 70 % des personnes âgées et à 30 % des personnes handicapées. Le programme semble donc cibler essentiellement les seniors en perte d’autonomie.

Une orientation cohérente avec les objectifs initiaux, mais qui soulève la question de la prise en compte d’autres profils fragiles, notamment les jeunes en situation de handicap ou les personnes précaires vivant dans un habitat dégradé sans entrer dans les critères d’âge ou de dépendance.

« En 2025, l’objectif est de rénover 45 000 logements », précise clairement le rapport. Mais atteindre un volume ne suffit pas à garantir une équité d’accès.

La répartition par GIR (Groupes Iso-Ressources), indicateur du niveau de dépendance, est évoquée, mais les données chiffrées par tranche restent absentes du reporting. De même, si la tranche d’âge des demandeurs est représentée graphiquement, l’analyse n’est pas documentée.

Ce manque de détail empêche une lecture plus fine de l’adéquation entre les publics aidés et les besoins prioritaires.

Outre-mer : des besoins criants, une réponse partielle

Le chiffre est frappant : seulement 11 % des dossiers engagés relèvent des territoires ultramarins. Une proportion faible, alors même que les Outre-mer concentrent une part disproportionnée de l’habitat indigne ou inadapté.

À titre d’exemple, selon l’Insee, plus de 20 % des logements ultramarins peuvent être considérés comme potentiellement indignes — contre environ 4,5 % dans l’Hexagone.

Autre donnée notable : 113 dossiers ont été accordés à des ménages à revenus supérieurs en Outre-Mer, selon les termes du rapport. Cette précision – « + 113 dossiers accordés pour des ménages aux niveaux de ressources supérieurs en Outre-Mer » confirme un élargissement progressif des bénéficiaires, mais aussi une inflexion de la cible initiale.

Une première dans le ciblage de cette catégorie sociale, qui pourrait marquer un élargissement de la politique publique vers les classes moyennes ultramarines.

Mais là encore, cette lecture reste ambivalente : faut-il y voir un signe de démocratisation de l’aide, ou un début de captation au détriment des plus fragiles, souvent confrontés à des difficultés administratives ou à une méconnaissance du dispositif ?

Ma Prime Logement Décent : des résultats spectaculaires, mais peu documentés

Du côté du dispositif Ma Prime Logement Décent, destiné à financer des travaux dans les logements non conformes aux normes de salubrité ou de sécurité, les résultats sont tout aussi marquants. À mi-2025, 3 970 logements ont été engagés, soit près du double de l’objectif annuel fixé à 2 000 logements pour les propriétaires occupants hors copropriétés.

Là encore, le rapport ne fournit que peu de détails sur la nature des logements concernés, les priorités territoriales ou les typologies des bénéficiaires. Une transparence partielle, qui limite la capacité à évaluer finement l’impact social et territorial du dispositif.

Des données qui interrogent autant qu’elles informent

Ces résultats traduisent indéniablement une montée en puissance des deux programmes. Mais ils laissent aussi apparaître des angles morts : l’absence de ventilation fine par territoire, le flou sur certains publics (jeunes handicapés, foyers isolés, ménages invisibles), et une présence limitée dans les zones où l’habitat dégradé est pourtant le plus répandu.

Alors que le second semestre s’annonce décisif pour tenir les objectifs chiffrés, les pouvoirs publics devront probablement affiner leur ciblage pour mieux répondre aux réalités territoriales et sociales, notamment dans les Outre-mer, qui cumulent vieillissement, isolement géographique, et fragilité du parc immobilier.


MaPrimeAdapt

Consulter le Bilan au 1er semestre 2025 des aides de l’Anah


À mi-parcours, MaPrimeAdapt’ et Ma Prime Logement Décent semblent sur la bonne voie pour atteindre — voire dépasser — leurs objectifs quantitatifs. Mais ces chiffres, aussi encourageants soient-ils, doivent être lus avec nuance. La performance ne peut se mesurer qu’à l’aune de l’équité d’accès. Et sur ce point, le retard structurel des Outre-mer reste largement intact.

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