Promulguée le 13 juin 2025, la loi n° 2025-534, dite « loi Bélim », marque une étape majeure pour l’habitat et la construction dans les départements et régions d’Outre-mer ainsi qu’à Saint-Martin. Présentée par la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) comme une avancée contre la vie chère, cette loi combine deux dispositifs inédits : l’encadrement expérimental des loyers et l’adaptation des règles de commercialisation des matériaux de construction. Le document de synthèse publié par le ministère chargé du Logement détaille ces nouvelles mesures, qui visent à répondre aux besoins spécifiques des territoires ultramarins.
—
Encadrer les loyers : une première en Outre-mer
Dans plusieurs communes ultramarines, le prix des loyers pèse lourdement sur le budget des ménages. Pour y répondre, la loi Bélim autorise, à titre expérimental, un encadrement des loyers privés jusqu’en 2030.
Les intercommunalités ont jusqu’en juin 2027 pour se porter candidates. Mais l’entrée dans le dispositif ne sera pas automatique : 3 conditions majeures doivent être remplies.
1 – Être en zone tendue : depuis août 2023, 38 communes ultramarines sont concernées, parmi lesquelles :
- Fort-de-France, Schoelcher, Ducos, Le Marin en Martinique ;
- Pointe-à-Pitre, Les Abymes, Baie-Mahault, Le Gosier en Guadeloupe ;
- Saint-Denis, Saint-Pierre, Saint-Paul, Le Tampon à La Réunion ;
- Cayenne, Matoury, Rémire-Montjoly en Guyane.
2 – Disposer d’un observatoire local des loyers (OLL) : seuls la Guadeloupe et La Réunion en possèdent aujourd’hui.
3 – Répondre à quatre critères cumulatifs :
- écart important entre loyers privés et sociaux,
- niveau médian des loyers élevé,
- faible construction de logements sur cinq ans,
- perspectives limitées de production dans le programme local de l’habitat.
Une fois la candidature validée, le dispositif prend un tour concret :
- le préfet fixe chaque année trois loyers de référence (médian, +20 %, –30 %) ;
- le loyer de base ne peut pas dépasser le plafond, sauf exception justifiée par le confort ou la localisation ;
- aucun complément n’est autorisé si le logement n’est pas décent.
Pour les locataires, plusieurs recours sont possibles :
- demander une baisse de loyer auprès du bailleur,
- saisir la commission départementale de conciliation,
- en dernier recours, bénéficier d’une mise en demeure ou de sanctions prononcées par le préfet (jusqu’à 5 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale).
Des matériaux de construction mieux adaptés aux réalités locales
L’autre volet de la loi Bélim concerne la construction. Jusqu’ici, la réglementation européenne imposait le marquage CE sur la plupart des produits de construction. Pour un industriel ultramarin, cette procédure représentait :
- un coût élevé d’homologation,
- une difficulté d’accès au marché pour les productions locales,
- une hausse des prix des matériaux importés.
Le règlement européen 2024/3110 adopté en novembre 2024 change la donne. Il permet aux États membres d’exempter les régions ultrapériphériques, dont les DROM et Saint-Martin. La loi Bélim met en œuvre cette possibilité en instaurant des comités référentiels construction.
Ces comités auront pour missions :
- identifier les matériaux pouvant être commercialisés sans marquage CE,
- évaluer leurs performances techniques,
- garantir leur qualité et leur sécurité.
Concrètement, une PME produisant des parpaings, briques ou tuiles localement pourra mettre ses produits sur le marché plus facilement. Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) accompagnera la démarche, avec des antennes locales dans les bassins Antilles-Guyane et Océan Indien.
Le calendrier est clair :
- 2e semestre 2025 : concertation avec les acteurs de la filière,
- 2026 : mise en place des comités référentiels construction.
Quels changements pour les acteurs locaux ?
Pour les ménages, l’encadrement des loyers offre une perspective d’allègement du budget logement, avec la garantie de recours clairs en cas d’abus.
Pour les bailleurs privés, il impose une nouvelle rigueur et un suivi administratif renforcé.
Les collectivités, elles, devront se montrer proactives : mettre en place ou renforcer des observatoires locaux des loyers, élaborer des programmes locaux de l’habitat solides et constituer des dossiers de candidature complets. C’est un investissement en ingénierie territoriale, mais aussi un levier pour mieux contrôler le marché locatif.
Quant à la filière BTP, elle pourrait bénéficier d’une baisse des coûts grâce à l’accès facilité aux matériaux locaux. Mais la réussite dépendra de la capacité des comités référentiels à définir des standards fiables et adaptés. Si l’équilibre est trouvé, les entreprises de construction ultramarines disposeront d’un outil précieux pour bâtir avec des ressources locales tout en respectant les exigences de qualité.
Consulter ici le guide « LOGEMENT ET HABITAT EN OUTRE-MER : CE QUE CHANGE LA LOI BELIM DU 13 JUIN 2025«









