Au deuxième trimestre 2025, l’IEDOM constate un paradoxe frappant dans l’économie mahoraise. Le climat des affaires s’est replié de 5,1 points pour s’établir à 104,8, malgré des carnets de commandes chargés dans le secteur du BTP. Les travaux d’urgence liés au passage du cyclone CHIDO avaient pourtant laissé espérer une dynamique plus forte. Mais derrière cette apparente vitalité, c’est la question de la trésorerie qui freine les entreprises.
—
Des carnets pleins mais une activité atone
Le secteur du bâtiment dispose d’un volume important de chantiers. Les marchés publics lancés dans l’urgence alimentent les carnets de commandes, qui restent fournis. Pourtant, la reprise tarde à se concrétiser. Les délais administratifs et les retards dans les flux financiers expliquent en partie ce décalage.
Comme le souligne l’IEDOM, « la dynamique de reconstruction peine à démarrer selon des chefs d’entreprises ». Autrement dit, l’activité existe sur le papier, mais elle ne se traduit pas encore par des rentrées d’argent suffisantes pour stabiliser les sociétés.
La trésorerie, talon d’Achille des entreprises
La fragilité des trésoreries apparaît comme le principal frein à la reprise. Beaucoup d’entreprises fonctionnent à flux tendu : les chantiers engagés génèrent des charges immédiates mais les paiements tardent à tomber. Ce décalage accentue le risque de défauts de paiement en chaîne, notamment vis-à-vis des sous-traitants et des fournisseurs.
L’IEDOM alerte : « 17,8 % des chefs d’entreprises interrogés craignent une défaillance de leur entreprise à horizon un an ». Dans le bâtiment, cette tension se traduit par des choix défensifs : réduction d’effectifs, gel des recrutements et recours limité aux crédits de trésorerie. Autrement dit, au lieu d’accompagner la relance, les entreprises se replient sur elles-mêmes pour survivre.
Des investissements limités au renouvellement
Les chiffres le montrent : les importations de biens d’investissement ont progressé de 14,8 % au deuxième trimestre, mais l’encours bancaire des crédits d’investissement reste quasi stable (+0,5 %).
L’effort est donc réel, mais insuffisant face aux besoins de reconstruction. La priorité va au renouvellement des outils de production détruits par le cyclone, plutôt qu’à de nouveaux projets de développement. Cette orientation illustre les limites d’un redémarrage qui se veut prudent, presque défensif.
Un moteur économique sous pression
Si le BTP concentre aujourd’hui les espoirs de relance, le panorama sectoriel montre à quel point cette filière est stratégique. Le commerce, habituellement moteur de consommation, a connu une chute brutale d’activité au deuxième trimestre, affectant stocks et trésoreries.
Les services marchands, de leur côté, affichent encore une progression mais les perspectives à court terme sont sombres : hausse attendue des prix, ralentissement des embauches. Dans ce contexte, le BTP reste l’un des rares secteurs disposant d’une demande solide grâce aux carnets de commandes.
Mais si la reconstruction post-Chido n’apporte pas rapidement de flux financiers concrets, c’est l’ensemble de l’économie mahoraise qui risque de rester enlisé dans l’attente.
Source : IEDOM – TENDANCES CONJONCTURELLES 2E TRIMESTRE 2025 – MAYOTTE
Le rapport de l’IEDOM le souligne avec clarté : « l’activité de ce deuxième trimestre est en baisse. La dégradation des niveaux de trésorerie affecte particulièrement la confiance des chefs d’entreprises ». En d’autres termes, sans sécurisation financière, les chantiers risquent de ne pas produire l’effet de relance attendu. Le BTP, censé incarner le moteur de la reconstruction, avance ainsi en terrain miné : il a les commandes, il a les besoins, mais il manque d’oxygène financier pour transformer l’essai.