Loyers privés à LA REUNION : un marché toujours sous tension en 2024

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En 2024, le loyer médian dans le parc locatif privé réunionnais atteint 10,90 €/m² hors charges. Une moyenne qui masque d’importantes disparités, mais qui souligne surtout un déséquilibre profond entre le niveau des loyers et la capacité réelle des ménages à y accéder. Plus de la moitié des foyers ne peuvent aujourd’hui se loger dans le secteur privé.

Les loyers au mètre carré selon les profils de logement

À La Réunion, la règle est constante : plus un logement est petit, plus son loyer au m² est élevé.

En 2024, les studios (T1) atteignent 13 €/m² contre seulement 9,40 €/m² pour les T5 et plus.

L’écart est encore plus net lorsqu’on observe les tranches de surface : les logements de moins de 30 m² se louent en moyenne à 17,30 €/m², soit plus du double des grandes surfaces supérieures à 120 m² (8,20 €/m²).

Cette hiérarchie tarifaire s’explique par plusieurs facteurs : rareté des petites surfaces, coûts fixes de construction élevés rapportés à une faible superficie, et rotation locative plus rapide générant plus de gestion et de risques de vacance. Les appartements, qui composent plus de la moitié du parc privé, sont globalement plus chers (11,90 €/m²) que les maisons (9,70 €/m²).

L’ancienneté du bâti pèse également : un logement construit après 2005 se loue 11,70 €/m², soit +2,30 €/m² par rapport à un bien d’avant 1991. Au-delà du coût du foncier, les exigences réglementaires (RTAA DOM, normes parasismiques) et les attentes en confort et équipement contribuent à cette hausse.

Un territoire aux loyers contrastés : zoom par intercommunalité

Les données confirment la forte disparité entre les intercommunalités réunionnaises.

  • Le Territoire de l’Ouest, secteur touristique et résidentiel, détient les loyers les plus élevés : un T1 y coûte 18,70 €/m², un T2 atteint 14,40 €/m².
  • Dans la CASUD, la pression est également forte sur les petites surfaces (T1 à 18 €/m²), bien que les grands logements y restent plus abordables (T5 à 8,30 €/m²).
  • La CIVIS se situe dans une fourchette intermédiaire, avec un T3 à 10,70 €/m².
  • La CINOR, malgré sa centralité, reste plus modérée, autour de 11 à 12,90 €/m² selon les typologies.

Aucune donnée n’est disponible pour la CIREST dans cette édition, ce qui laisse un angle mort sur l’est du territoire.

Ces écarts reflètent la diversité géographique, économique et sociale de l’île. La pression locative est particulièrement marquée dans les zones balnéaires, les communes littorales et les bassins d’emplois. En arrière-plan, se dessine une carte des micromarchés réunionnais, avec des comportements locatifs très localisés, liés aux dynamiques d’emploi, d’accès aux services, et de qualité de vie.

Les ménages réunionnais face à une offre inaccessible

Derrière ces chiffres, la réalité sociale est préoccupante. En 2024, plus d’un ménage réunionnais sur deux n’a pas les revenus nécessaires pour louer dans le parc privé. Le décalage est encore plus fort pour certaines catégories.

Plus de 75 % des familles monoparentales n’ont pas les moyens de louer un T4. Quatre couples avec enfants sur dix sont dans la même situation. Quant aux personnes seules, près de 60 % ne peuvent même pas louer un studio.

Les aides au logement jouent un rôle d’amortisseur : 60 % des locataires du parc privé en bénéficient. Mais cela ne suffit pas à corriger l’inadéquation structurelle entre l’offre et la demande.

L’écrasante majorité des ménages locataires du privé (92 %) sont éligibles au logement social ou intermédiaire. Ce chiffre révèle une situation de fragilité structurelle du marché privé pour les publics modestes.

Le parc privé reste plus cher que le logement social

Le loyer médian du parc social réunionnais s’élève à 6,40 €/m². À typologie égale, cela représente un différentiel de 4,50 €/m² par rapport au privé. Même les logements dits « intermédiaires », comme ceux financés en PLS, présentent un écart significatif : 2,40 €/m² de moins. Les LLI (logements locatifs intermédiaires) sont eux aussi plus accessibles, avec un différentiel de 1,60 €/m².

Ces écarts témoignent d’un marché privé relativement libre, du moins jusqu’en 2023. Depuis le décret du 25 août 2023, 9 communes réunionnaises sont passées en zone tendue, ce qui impose un encadrement des loyers à la relocation, via l’indice de référence IRL. C’est une avancée, mais encore partielle : elle ne s’applique pas à l’ensemble de l’île, ni aux situations de bail renouvelé ou à certaines exceptions réglementaires.

Tendances émergentes issues des annonces en ligne

L’analyse des annonces publiées sur les plateformes SeLoger et leboncoin révèle une autre facette du marché. Les loyers affichés y sont plus élevés que ceux observés dans le parc global.

En meublé, les maisons se négocient à 19,20 €/m², les appartements à 15,70 €/m².

En non-meublé, ces valeurs descendent à 13,50 € et 11,50 €/m² respectivement.

Les meublés représentent désormais plus de la moitié des offres (51 %), avec une forte présence dans les secteurs touristiques et périurbains. La durée de publication, courte (11 à 13 jours), traduit une demande active et un turnover élevé. Les professionnels concentrent les petites surfaces, souvent mieux valorisées, tandis que les particuliers proposent davantage de grandes maisons.

Si ces données restent exploratoires, elles confirment une tendance haussière sur certains segments, notamment pour les locations meublées, plus souples juridiquement et fiscalement attractives pour les bailleurs.

Un contexte local à resituer dans une dynamique nationale

Comparée à d’autres territoires ultramarins, La Réunion affiche des loyers médians plus élevés que la Guadeloupe ou la Guyane sur certains segments (ex : studios, T2), mais des loyers globaux inférieurs à ceux observés dans certaines agglomérations tendues de métropole. Néanmoins, le rapport entre loyers et revenus y est plus défavorable : le taux de pauvreté, l’insularité et la pression foncière renforcent l’exclusion locative.

La pérennisation de l’Observatoire des loyers privés via l’agrément ministériel obtenu en août 2024 offre une base solide pour ajuster les politiques locales. Il permet une connaissance fine et récurrente du marché, indispensable pour orienter la production de logements abordables, calibrer les dispositifs fiscaux (PINEL Outre-mer, LLI), ou identifier les zones où mobiliser du foncier public.


Source : Observatoire des loyers privés – Résultats 2024, – par l’ADIL de la Réunion et l’AGORAH.


Le marché locatif privé reste tendu à La Réunion. Les données 2024 confirment la nécessité d’ajuster l’offre aux capacités réelles des ménages.

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