les PME toujours moins rentables dans les DOM, sauf en GUYANE et à LA REUNION

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PME DOM

Les petites et moyennes entreprises ultramarines naviguent dans un environnement économique à part. Marchés restreints, insularité, accès limité aux intrants ou au financement… autant de réalités qui façonnent leurs performances. Dans sa dernière publication (Insee Analyses n°111, juillet 2025), l’Insee dresse un bilan chiffré des écarts de rentabilité financière entre les PME d’outre-mer et celles de l’Hexagone. Derrière les moyennes nationales, parfois trompeuses, apparaissent des trajectoires contrastées — et quelques signes de résilience qui méritent l’attention.

Des entreprises plus petites, plus isolées

Premier constat, les PME ultramarines sont en moyenne plus petites que leurs homologues métropolitaines. En 2022, leur chiffre d’affaires hors taxes s’établit entre 1,34 et 1,41 million d’euros selon les territoires, contre 1,53 million en France métropolitaine. Un différentiel qui n’est pas anodin.

Ces entreprises sont aussi moins souvent intégrées à un groupe économique — à peine 6,5 % en Guadeloupe, contre 11,6 % dans l’Hexagone.

Autre particularité : une plus forte proportion d’entreprises individuelles dans certains territoires comme la Guyane (9,6 %) ou La Réunion (10,2 %), et un tissu économique moins diversifié.

Le nombre de codes APE recensés illustre bien cette concentration : 290 en Guyane, contre 602 en métropole. Cette structuration restreint la mutualisation des coûts et limite les possibilités d’innovation intersectorielle.

Des charges intermédiaires qui grignotent la valeur ajoutée

Autre facteur de fragilité : le poids des consommations intermédiaires dans le chiffre d’affaires. En Guadeloupe, cette part atteint 73,1 %, contre 69,1 % dans l’Hexagone. Ce recours massif aux intrants extérieurs — souvent importés — est un effet direct des contraintes d’éloignement géographique.

Résultat logique : un taux de valeur ajoutée plus faible. Il s’établit à 27,8 % en Guadeloupe, à 28,9 % en Martinique et à 29,9 % en Guyane, quand la moyenne métropolitaine dépasse les 31 %.

Dans les mots mêmes de l’Insee, « cette structure de coûts fait apparaître en miroir un taux de valeur ajoutée plus faible dans les départements ultramarins ».

Malgré cela, les DOM enregistrent parfois un taux de marge plus favorable. En Guyane, il atteint 8,4 %, contre 6,6 % en métropole. Cet écart s’explique notamment par une part des charges de personnel plus faible dans la valeur ajoutée (20,7 % en Guadeloupe contre 24,8 % en métropole).

Productivité en retrait : une affaire de structure

La productivité apparente du travail reste un talon d’Achille pour les PME d’outre-mer. En 2022, elle varie de 52,8 milliers d’euros par salarié à La Réunion à 57,9 en Guyane, quand la moyenne métropolitaine s’élève à 64,9. M

ais cette faiblesse ne relève pas d’un manque d’efficacité individuelle : elle découle surtout de la spécialisation dans la « sphère présentielle », tournée vers la demande locale (commerce, services aux personnes), moins automatisée et moins génératrice de valeur.

À titre d’exemple, la part du chiffre d’affaires réalisé dans cette sphère atteint 61,8 % en Martinique, 60,2 % à La Réunion, contre 49,4 % dans l’Hexagone. Les territoires ultramarins concentrent donc une grande partie de leur activité dans des secteurs structurellement moins productifs.

Le crédit plus cher qu’ailleurs

S’ajoute à cela un accès au financement nettement plus onéreux. Les PME ultramarines supportent des taux d’intérêt supérieurs, traduisant une perception de risque accrue chez les financeurs. En Guyane, ce taux atteint 3,7 %, contre 1,9 % en métropole.

Le taux de prélèvement financier, c’est-à-dire le poids des charges d’intérêts rapporté à la valeur ajoutée, monte à 10,1 % en Guyane et dépasse les 9 % à La Réunion, soit un écart de plus de 3 points par rapport à la moyenne nationale.

L’Insee résume ainsi cette situation : « les PME dans les DOM supportent souvent un taux d’intérêt apparent plus élevé, du fait notamment de la perception d’un risque accru par les financeurs ».

Des performances remarquables… en haut de distribution

Si les moyennes ne jouent pas en faveur des DOM, certaines entreprises tirent leur épingle du jeu. En Guyane, les 10 % de PME les plus rentables enregistrent une performance supérieure de 3,9 % à celle de leurs homologues les plus rentables en métropole. Un avantage probablement lié à la présence de la filière spatiale, avec des effets directs ou indirects sur le tissu économique local.

Même tendance à La Réunion, où les très petites entreprises (moins de 10 salariés), ancrées localement et bénéficiaires de déductions fiscales, affichent une rentabilité supérieure de 1,6 % en haut de la distribution. Ces niches de performance, bien que limitées, témoignent d’un potentiel à exploiter.


Les écarts de rentabilité entre PME des DOM et de l’Hexagone ne relèvent pas d’une simple question de performance individuelle, mais bien de facteurs structurels : taille, spécialisation sectorielle, coût du financement, dépendance aux importations. Toutefois, certaines entreprises ultramarines montrent qu’il est possible de faire mieux — voire bien mieux — dans des contextes ciblés. L’enjeu est désormais de transformer ces réussites isolées en dynamiques plus larges, structurantes et durables.

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