GUYANE. Transports routiers et déchets, les deux moteurs du bilan carbone guyanais

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En Guyane, les émissions de gaz à effet de serre ont peu évolué en trois décennies : le total annuel reste proche de 400 à 500 kilotonnes équivalent CO₂ (ktCO₂e). Pourtant, derrière cette apparente stabilité, certains secteurs connaissent une dynamique bien différente. Selon les données publiées par le CITEPA dans son inventaire 2024 couvrant la période 1990–2022, les transports routiers affichent une croissance continue depuis 1990, tandis que les déchets contribuent de plus en plus au bilan climatique à travers les émissions de méthane. Ensemble, ces deux secteurs illustrent les nouveaux défis de la transition écologique guyanaise.

Le poids croissant du transport routier

Le secteur des transports routiers est devenu, au fil des années, l’un des contributeurs majeurs aux émissions de gaz à effet de serre en Guyane. En 1990, son empreinte carbone était encore relativement modeste, mais les données du CITEPA montrent une progression constante tout au long de la période 1990–2022.

Cette hausse s’explique par une dépendance structurelle à la voiture individuelle. L’étalement urbain, la faiblesse des transports collectifs et la croissance démographique ont entraîné une multiplication du parc automobile. Chaque année, davantage de véhicules particuliers et utilitaires circulent sur les routes guyanaises, entraînant une hausse parallèle de la consommation d’essence et de gazole.

Au-delà du dioxyde de carbone (CO₂), le transport routier pèse lourd dans les polluants atmosphériques :

  • Les émissions de NOₓ (oxydes d’azote) restent élevées, atteignant encore plus de 1 400 tonnes en 2022.
  • Le monoxyde de carbone (CO), indicateur de combustions incomplètes, augmente légèrement sur la période (+19 % entre 1990 et 2022).

Les conséquences sont multiples : contribution au réchauffement climatique, mais aussi effets sur la qualité de l’air urbain et la santé publique. Dans un territoire où la mobilité est essentielle, l’absence d’alternatives massives au transport individuel pèse lourdement sur le bilan environnemental.

Les déchets : la montée silencieuse du méthane

Moins visible au quotidien que les embouteillages, la question des déchets constitue un autre défi environnemental. Les données du CITEPA indiquent une hausse significative des émissions de méthane (CH₄) en provenance des sites de stockage et de la gestion des déchets. Or, ce gaz possède un pouvoir de réchauffement global 28 fois supérieur à celui du CO₂, ce qui en fait un contributeur majeur malgré des volumes en apparence limités.

Depuis 1990, l’augmentation des volumes de déchets, conséquence directe de la croissance démographique et de l’urbanisation, s’est traduite par une intensification des émissions. En 2022, le secteur des déchets représente une part de plus en plus importante du bilan climatique guyanais.

À cela s’ajoutent des émissions connexes de COVNM (composés organiques volatils non méthaniques) et de CO, liées à la décomposition ou à des pratiques comme le brûlage à l’air libre. Ces polluants affectent à la fois le climat et la qualité de l’air local.

Le problème est amplifié par une faiblesse du captage du biogaz dans les installations existantes et un retard structurel dans la mise en place de solutions de valorisation énergétique ou de méthanisation.

Deux secteurs sous pression, un même défi

Bien que différents, les transports et les déchets présentent des trajectoires similaires :

  • Tous deux sont étroitement liés à la croissance démographique et urbaine.
  • Tous deux connaissent une augmentation continue de leurs émissions depuis 30 ans, contrairement à d’autres secteurs (énergie, industrie) où l’on observe des réductions.
  • Tous deux posent des défis d’infrastructures : routes saturées d’un côté, centres de tri et installations de traitement insuffisantes de l’autre.

Ils constituent donc des points noirs persistants dans le bilan climatique guyanais, difficiles à maîtriser sans une stratégie de long terme.


Consulter ici l’inventaire CITEPA Outre-mer 2024


En trois décennies, la Guyane a réussi à réduire certains polluants atmosphériques comme le dioxyde de soufre (–91 % entre 1990 et 2022). Mais cette réussite masque des défis persistants : les transports routiers et les déchets sont aujourd’hui les moteurs principaux de la hausse des émissions locales. Leur trajectoire contraste avec les progrès enregistrés dans d’autres secteurs et rappelle qu’une véritable transition écologique doit passer par une mobilité repensée et une gestion moderne des déchets. Ces deux domaines concentrent à la fois des défis techniques et des contraintes structurelles, mais aussi une part croissante de la responsabilité climatique du territoire.

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