Finances locales 2024 : les DROM conservent une stabilité fragile, selon la Cour des comptes

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    Dans son rapport annuel publié en juin 2025, la Cour des comptes dresse un état des lieux contrasté des finances locales dans les départements et régions d’outre-mer. Malgré une stabilité apparente en 2024, les collectivités ultramarines restent confrontées à de fortes contraintes structurelles.

    Une lecture globale laisse entrevoir des indicateurs plutôt stables

    La situation financière des collectivités d’outre-mer s’est globalement maintenue en 2024, selon le fascicule 1 du rapport Les finances publiques locales 2025. Les produits réels de fonctionnement ont progressé de +2,2 %. Pour les autres charges, elles ont augmenté à un rythme légèrement inférieur (soit une augmentation de 1,9 %), pour un total de 8,7 milliards d’euros. L’épargne brute atteint ainsi 1,3 milliard d’euros, en hausse de +4,3 %.

    Cependant, cette stabilité apparente masque des disparités importantes entre territoires ultramarins. L’épargne nette des DROM, après remboursement des emprunts, diminue de -4,8 %, pour s’établir à 0,8 milliard d’euros.

    La Cour souligne aussi que « l’encours de l’endettement financier (6,2 milliards d’euros) a un peu diminué de 0,4 %, tandis que la trésorerie (1,7 milliards d’euros) a un peu augmenté de 2,5 % ». Fin 2024, cette trésorerie représente en moyenne 2,3 mois de charges de fonctionnement.

    Autre point positif : le ratio de désendettement des DROM s’est amélioré et reste globalement plus favorable que celui des collectivités de l’Hexagone, bien que la Martinique et La Réunion conservent un niveau supérieur à la moyenne nationale.

    Des inégalités territoriales persistantes

    En moyenne, les DROM ont perçu 4 522 euros de recettes de fonctionnement par habitant, soit 19 % de plus que les collectivités de la France hexagonale. Mais cet écart cache de profondes disparités entre territoires.

    En 2024, la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion affichent respectivement des recettes par habitant supérieures de 41 %, 24 % et 38 % à celles de la métropole. À l’inverse, Mayotte reste nettement en retrait, avec 26 % de recettes de moins par habitant.

    La Cour rappelle que « l’appréciation du niveau des recettes des collectivités d’Outre-mer doit toutefois tenir compte des écarts des prix d’achat des biens et services », ainsi que des surcoûts salariaux. Dans certains territoires, comme à La Réunion, les sursalaires peuvent atteindre 53 % du traitement indiciaire des agents publics.

    Malgré des recettes parfois supérieures à la moyenne nationale, plusieurs signaux de fragilité révèlent les limites du modèle local. L’épargne brute du bloc communal ultramarin s’élève à 11,6 % des produits de fonctionnement, contre 17 % en métropole.

    Dans plusieurs territoires, les communes peinent à dégager des marges suffisantes pour financer leurs projets, du fait du poids des charges fixes et des surcoûts d’exploitation.

    Un suivi budgétaire renforcé par les CRC

    Les tensions de trésorerie restent préoccupantes pour de nombreuses collectivités, notamment au niveau communal. Selon la Cour, « des situations de trésoreries demeurent fragiles pour un grand nombre de DROM », en particulier dans les communes et leurs satellites comme les centres communaux d’action sociale ou les caisses des écoles.

    Cette fragilité se traduit par une surreprésentation des DROM dans les saisines des chambres régionales des comptes (CRC). Ces juridictions interviennent dans le cadre du contrôle budgétaire pour vérifier l’équilibre des comptes, constater les déficits, et proposer des plans de redressement pluriannuels. Chaque année, elles s’assurent également que les mesures correctrices sont bien mises en œuvre.

    Les retards de paiement aux fournisseurs aggravent ces difficultés : ils dépassent les 60 jours dans plus d’une entité locale sur cinq en Guadeloupe, et une sur quatre en Martinique.

    Par ailleurs, « des collectivités d’Outre-mer et des satellites de ces dernières étaient redevables de près de 67 millions d’euros de cotisations et de contributions sociales fin 2024 », certaines dettes remontant jusqu’à 2018, selon les données transmises par le réseau des Urssaf.

    Une stabilité comptable sous vigilance

    En résumé, si les équilibres globaux semblent maîtrisés, les collectivités ultramarines demeurent exposées à des fragilités systémiques. Entre retards de paiement, déséquilibres d’épargne et surcoûts structurels, la stabilité observée en 2024 masque des vulnérabilités persistantes. Pour la Cour des comptes, le suivi renforcé des CRC et la diversité des situations locales appellent à « une lecture différenciée de la situation financière des collectivités ultramarines ».


    Consulter le rapport de la Cour des comptes


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