Face à la hausse des prix de l’énergie, aux obligations du décret tertiaire et aux effets du changement climatique, les établissements médico-sociaux cherchent des solutions durables. La géothermie de surface s’impose de plus en plus comme une alternative crédible. Des retours d’expérience concrets, associés aux dispositifs financiers disponibles, permettent aujourd’hui de mesurer la pertinence de ce choix.
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Des enjeux énergétiques et humains pressants
Les EHPAD et cliniques sont confrontés à un double défi : réduire leurs factures tout en assurant un confort thermique indispensable pour des résidents particulièrement vulnérables.
La santé des personnes âgées impose des températures maîtrisées, généralement entre 20 et 22 °C, sans dépasser 24 °C. Dans un contexte de réchauffement climatique, où les vagues de chaleur se multiplient, le besoin de solutions capables de fournir à la fois du chaud et du froid est devenu central.
La géothermie de surface, qui exploite la chaleur du sous-sol à moins de 200 mètres, répond précisément à cette exigence.
Des projets concrets qui donnent la mesure
Plusieurs établissements médico-sociaux ont déjà franchi le pas. À Plancoët, l’EHPAD du Petit Bily a opté pour une pompe à chaleur géothermique, garantissant une régulation efficace du confort des résidents.
Plus emblématique encore, la Clinique Saint-Roch de Cambrai illustre l’intérêt d’une stratégie progressive. Entre 2009 et 2016, l’établissement a déployé une installation sur nappe phréatique, accompagnée d’extensions successives.
Le projet, financé à hauteur de 369 000 €, dont 141 000 € de subventions ADEME et 27 000 € pour les études, affiche aujourd’hui des résultats probants : –35 % d’émissions de gaz à effet de serre, confort accru pour les patients, baisse des consommations et conditions de travail améliorées pour le personnel.
Les charges annuelles d’exploitation s’élèvent à 53 985 €, incluant maintenance et électricité, soit un budget maîtrisé au regard des services rendus.
À Chindrieux, l’EHPAD Les Fontanettes a combiné rénovation thermique et installation géothermique lors de son extension. Résultat : la chaleur et le rafraîchissement fournis à coût maîtrisé, avec un amortissement du surcoût d’investissement en moins de dix ans.
Ces expériences révèlent à la fois la faisabilité technique, l’importance d’une préparation financière solide et la nécessité de compétences spécialisées dans la mise en œuvre.
Des coûts significatifs mais maîtrisables
Un projet géothermique demande un investissement initial conséquent. Les études de faisabilité coûtent entre 5 000 et 40 000 €, tandis que les forages sur sondes se situent autour de 100 à 130 € par mètre linéaire.
Les CAPEX varient selon la taille des établissements : environ 131 000 € pour une résidence seniors de 24 logements, 604 500 € pour un EHPAD de 72 places et plus d’un million d’euros pour un établissement de 117 places.
Mais la compétitivité de la géothermie se mesure sur le temps long : avec un coût complet (LCOE) oscillant entre 98 €/MWh (nappe) et 135 €/MWh (sondes), les installations deviennent particulièrement attractives lorsqu’elles produisent à la fois du chaud et du froid, réduisant le LCOE de 15 à 50 %. Les temps de retour sont généralement inférieurs à 12 ans.
Le rôle décisif des aides financières
Sans soutien public, peu d’établissements franchiraient le cap. Le Fonds chaleur de l’ADEME reste la pierre angulaire du financement. Il couvre aussi bien les études de faisabilité que l’investissement, avec des taux d’aide de 50 à 70 % selon la nature du porteur de projet.
Les Certificats d’économies d’énergie (CEE), les aides régionales ou européennes (FEDER) et des dispositifs comme Diag Perf’Immo ou Booster Entreprise complètent cet arsenal. Ces mécanismes sont essentiels pour aider les gestionnaires à respecter les objectifs du décret tertiaire, qui impose –40 % de consommation énergétique d’ici 2030.
Toutefois, les retours du terrain pointent aussi des limites : lourdeur administrative, budgets parfois saturés dès le milieu d’année, disparités régionales. Dans certains cas, comme en Bourgogne-Franche-Comté en 2025, les enveloppes pour les études étaient déjà épuisées, obligeant à repousser les projets.
Une énergie fiable et vertueuse
Au-delà des chiffres, la géothermie séduit par sa stabilité et son impact environnemental réduit. Avec 17 g de CO₂ émis par kWh de chaleur produit, elle reste largement en dessous de l’électricité, du gaz et du fioul.
Sa fiabilité technique, sa sécurité d’exploitation et sa capacité à fournir du froid en été en font un atout majeur pour des établissements où la qualité de vie et la santé des résidents priment. Certes, la mise en place demande patience et compétences spécialisées, mais les bénéfices sur le long terme sont indéniables.
Les retours d’expérience démontrent que la géothermie n’est pas une promesse abstraite mais une réalité déjà opérationnelle dans plusieurs établissements de santé et médico-sociaux. Les investissements nécessaires, bien que significatifs, deviennent viables grâce aux dispositifs d’aides et aux économies générées sur la durée. À l’heure où les établissements doivent conjuguer confort, sobriété énergétique et décarbonation, la géothermie s’impose comme une solution crédible, durable et adaptée aux besoins spécifiques des personnes âgées.