Le 5 juin 2025, le gouvernement a publié le décret n°2025-498, modifiant en profondeur les règles encadrant les seuils de puissance éligibles aux dispositifs de soutien aux énergies renouvelables en France. Publié au Journal officiel le 7 juin 2025, ce texte ajuste les dispositifs d’obligation d’achat et de complément de rémunération, afin de mieux cibler les petits producteurs et d’adapter le système aux évolutions des marchés électriques.
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Un décret pour ajuster les dispositifs de soutien aux EnR
Le nouveau décret vise d’abord à mettre le droit français en conformité avec les exigences communautaires. Les modifications interviennent dans un contexte de tensions croissantes sur les marchés électriques, marqués par la multiplication des épisodes de prix négatifs, notamment sur certaines places européennes fortement interconnectées. Pour répondre à ces distorsions de marché et éviter des soutiens trop généreux à des acteurs profitant de ces anomalies, le gouvernement ajuste finement les seuils des guichets tarifaires.
Deux dispositifs restent au cœur du soutien public :
- L’obligation d’achat (OA), principalement destiné aux petites installations.
- Le complément de rémunération (CR), réservé aux installations de puissance supérieure.
Le décret révise ainsi les articles D.314-15 et D.314-23 du code de l’énergie, avec des dates d’entrée en vigueur différenciées selon les filières.

Les modifications détaillées par filière
Hydroélectricité : un abaissement progressif
Le secteur de l’hydroélectricité est directement concerné par un abaissement du plafond d’éligibilité à l’obligation d’achat. Jusqu’ici fixé à 500 kW, ce seuil passe à 400 kW dès le lendemain de la publication du décret, soit à compter du 8 juin 2025. Une seconde réduction interviendra au 1er janvier 2026, ramenant le plafond à 200 kW.
Au-delà de ces puissances, les projets devront se tourner vers le complément de rémunération, qui reste plafonné à 1 MW pour les petites centrales hydrauliques. Ces adaptations visent à recentrer l’obligation d’achat sur les très petites unités, tout en maintenant un soutien partiel pour les installations intermédiaires.
Photovoltaïque sur bâtiment : seuils abaissés dès 2026
Le photovoltaïque en toiture conserve, dans un premier temps, le plafond actuel de 500 kWc (soit environ 400 kW électriques). Ce maintien temporaire s’appliquera jusqu’au 31 décembre 2025. À compter du 1er janvier 2026, le seuil de l’obligation d’achat sera abaissé à 200 kWc.
Cette évolution va considérablement restreindre le périmètre des projets éligibles à l’OA. Les porteurs de projets au-delà de ce seuil devront désormais, sauf évolution réglementaire ultérieure, passer par les appels d’offres ou des dispositifs spécifiques. Cette transition a pour but d’éviter les effets d’aubaine sur des projets de taille moyenne, souvent en mesure de supporter une mise en concurrence.
Photovoltaïque au sol : un guichet tarifaire enfin ouvert
Jusqu’ici, les installations photovoltaïques au sol ne bénéficiaient pas de guichet tarifaire en France et devaient systématiquement passer par des appels d’offres. Le décret introduit désormais un accès direct aux dispositifs de soutien pour les petits projets.
2 niveaux sont définis :
- L’obligation d’achat est ouverte aux installations d’une puissance inférieure ou égale à 200 kWc.
- Le complément de rémunération devient accessible pour les projets d’une puissance strictement supérieure à 200 kWc et inférieure ou égale à 1 MWc.
Cette réforme introduit ainsi une voie simplifiée de développement pour de nombreux projets photovoltaïques au sol de petite et moyenne taille, souvent portés par des collectivités, des exploitations agricoles ou des acteurs locaux.
Énergies marines : un accès au complément de rémunération élargi
Le décret introduit également une évolution significative pour les énergies marines. Les projets expérimentaux (éolien flottant, marémoteur, houlomoteur, osmotique, etc.) sélectionnés dans le cadre d’appels à projets nationaux ou européens bénéficieront désormais d’un complément de rémunération, en remplacement de l’obligation d’achat.
Le dispositif concerne les projets dont la puissance installée est comprise entre 200 kW et 25 MW. L’intégration de ces technologies innovantes dans le mécanisme du CR vise à offrir un cadre de soutien plus souple, mieux adapté à des technologies encore en développement mais stratégiques pour la transition énergétique.
Des ajustements qui ciblent les petits producteurs
L’ensemble de ces mesures traduit une volonté claire de redéfinir le périmètre des dispositifs de soutien public. En abaissant les seuils des guichets tarifaires, l’État entend réserver l’obligation d’achat aux plus petites unités de production et orienter les porteurs de projets plus importants vers des mécanismes de marché ou des procédures d’appel d’offres plus concurrentielles.
Ces ajustements visent aussi à mieux maîtriser la dépense publique liée aux charges de service public de l’énergie, tout en préservant un soutien aux projets locaux, souvent portés par des collectivités, des exploitations agricoles ou des petits investisseurs. Jusqu’ici, certains projets semi-industriels parvenaient à contourner la logique concurrentielle en demeurant sous les seuils élevés des OA, bénéficiant ainsi de tarifs administrés sans mise en concurrence. Le resserrement des seuils limite désormais ces stratégies d’optimisation réglementaire.
En parallèle, le gouvernement cherche à accompagner le développement des technologies innovantes, notamment dans le domaine des énergies marines, tout en réservant les guichets tarifaires aux segments réellement adaptés à ce type de soutien. Cette nouvelle architecture vise ainsi un double objectif : sécuriser le financement des très petits producteurs et garantir une meilleure efficience économique des dispositifs de soutien à l’échelle nationale.









