MAYOTTE. la géothermie de Petite-Terre, une énergie verte en perspective

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Mayotte repose sur un modèle énergétique encore largement dépendant des énergies fossiles. Avec ses deux centrales thermiques fonctionnant au diesel, l’île produit près de 95 % de son électricité à partir de cette source polluante, tandis que les énergies renouvelables, principalement photovoltaïques, ne représentent que 5 % du mix électrique. Ce constat a poussé la collectivité départementale à explorer de nouvelles options pour diversifier ses sources d’énergie. Parmi ces solutions, la géothermie profonde de Petite-Terre apparaît comme une alternative prometteuse.

Pourquoi Petite-Terre ? Un territoire prometteur pour la géothermie

L’île de Petite-Terre, partie intégrante de l’archipel de Mayotte, présente un contexte géologique particulièrement favorable à l’exploration géothermique. Ce secteur est caractérisé par une activité magmatique et volcanique ancienne, marquée par la présence de structures fracturées dans le sous-sol, propices à la circulation de fluides chauds.

Dès 2005, le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) a identifié cette région comme potentiellement riche en ressources géothermales. C’est dans ce cadre qu’une première phase d’études s’est déroulée de 2005 à 2008, suivie de nouvelles campagnes entre 2018 et 2022, pour affiner les résultats et confirmer la présence de cette ressource.

 

Des méthodes de pointe pour explorer les profondeurs

Une exploration sur trois fronts : Pour confirmer le potentiel géothermique de Petite-Terre, le BRGM a déployé un arsenal de méthodes scientifiques au fil des années. Sur le terrain, entre 2018 et 2022, les chercheurs ont réalisé des relevés géologiques permettant de caractériser les structures du sous-sol, notamment les fractures et les failles. Ces données sont cruciales pour comprendre la perméabilité des roches, un facteur déterminant pour l’existence d’un réservoir géothermique.

En parallèle, des études géochimiques ont été menées pour analyser les gaz présents dans le sous-sol, principalement le dioxyde de carbone (CO₂), le méthane (CH₄) et l’hélium. Ces gaz, d’origine magmatique, fournissent des indices précieux sur la température des fluides circulant en profondeur.

Enfin, des techniques géophysiques ont été employées, notamment la magnétotellurique, qui permet de cartographier la résistivité électrique du sous-sol. Cette méthode a aidé les experts à visualiser la structure interne de la région et à identifier les zones les plus favorables à une exploitation géothermique.

Simuler le sous-sol : quand les modèles 3D prennent vie

Les données collectées sur le terrain ont ensuite été intégrées dans un modèle géologique 3D, construit avec la plateforme Geomodeller. Ce modèle a été finalisé en janvier 2023 et a permis de simuler la circulation des fluides dans le réservoir géothermique de Petite-Terre.

Les simulations hydrothermiques, réalisées avec l’outil ComPASS, ont révélé l’existence probable d’un réservoir à une profondeur de 1 000 à 1 500 mètres, avec une température estimée à 250°C, voire plus.

Ce modèle a également mis en évidence l’importance des failles orientées NO-SE, qui jouent un rôle clé dans la circulation des fluides. Ces fractures, en permettant le drainage des eaux chaudes, augmentent la probabilité de rencontrer une ressource géothermale exploitable.

 

Un potentiel géothermique confirmé : ce que révèlent les analyses

Les investigations menées par le BRGM entre 2018 et 2022 ont confirmé la présence d’un réservoir géothermique à haute température sous Petite-Terre. Situé entre 1 000 et 1 500 mètres de profondeur, ce réservoir affiche une température moyenne de 250°C, voire plus par endroits.

Les analyses géochimiques ont révélé la présence de gaz magmatiques, notamment du dioxyde de carbone (CO₂), du méthane (CH₄) et de l’hélium (He), issus directement des profondeurs de la croûte terrestre.

Ces gaz constituent des indicateurs précieux d’une activité géothermale active, prouvant que les fluides chauds circulent au sein des structures géologiques de la région. Les failles en transtension, orientées NO-SE, jouent un rôle essentiel dans cette circulation, agissant comme des canaux naturels pour les fluides.

Ce réseau de fractures favorise la montée des eaux chaudes, rendant la zone de Petite-Terre particulièrement prometteuse pour une exploitation géothermique.

Trois zones à fort potentiel pour les forages

L’analyse des données géophysiques, complétée par les modélisations géologiques en 3D, a permis de cibler trois zones stratégiques pour des sondages exploratoires :

  1. La zone entre le lac Dziani et les maars de Moya, caractérisée par une forte activité géothermale en surface.
  2. La plage de l’aéroport, où des émissions de gaz, notamment du CO₂, sont régulièrement observées.
  3. Le centre de l’île, une région présentant des conditions géologiques favorables à la présence d’un réservoir.

Ces trois sites ont été sélectionnés selon des critères scientifiques rigoureux, prenant en compte la température, la perméabilité des roches et les indices géochimiques, garantissant leur potentiel géothermique.

 

Forer pour confirmer : un programme de sondages ambitieux

Le BRGM a prévu la réalisation de trois forages exploratoires, chacun d’une profondeur de 1 500 mètres. Ces forages seront réalisés dans les trois zones identifiées comme les plus prometteuses : entre le lac Dziani et les maars de Moya, sur la plage de l’aéroport, et au centre de l’île. Ces trois zones ont été confirmées comme prioritaires lors des analyses menées entre 2018 et 2022.

Chacun de ces forages sera équipé d’un cuvelage spécifique, avec une colonne de 7’’ jusqu’à 800 mètres de profondeur, puis un diamètre de 6’’1/8 dans la section la plus profonde. Ces caractéristiques ont été définies dans le cadre des études de faisabilité réalisées entre 2021 et 2022.

L’objectif de ces forages est de recueillir des données cruciales qui ne peuvent être obtenues par les seules investigations de surface. En traversant les couches géologiques et les fractures, ces sondages permettront de mesurer directement la température des fluides en profondeur, de prélever des échantillons pour analyser leur composition chimique, et de déterminer la perméabilité des roches du réservoir.

Des objectifs clairs pour ces sondages

Les forages exploratoires viseront à confirmer les paramètres critiques de la ressource géothermale :

  • La température réelle des fluides, avec une précision permettant de valider les estimations par géothermométrie.
  • La composition chimique des fluides, essentielle pour déterminer leur origine et leur potentiel de production.
  • La perméabilité des roches, un facteur déterminant pour évaluer la capacité de production d’électricité du réservoir.
  • Le débit des fluides, permettant de calculer la capacité de production énergétique potentielle.

Ces sondages permettront de passer de l’hypothèse à la certitude, en offrant une vision claire de la ressource géothermale de Petite-Terre.


RESSOURCE À CONSULTER :

RAPPORT FINAL – Exploration des potentielles ressources géothermiques profondes de Petite Terre (Mayotte)


 

Si les sondages confirment les prévisions, la géothermie pourrait transformer le mix énergétique de Mayotte, réduisant la dépendance aux énergies fossiles et augmentant la part des énergies renouvelables. La géothermie, source d’énergie continue et stable, pourrait devenir un pilier de l’autonomie énergétique de l’île.

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