Les territoires d’Outre-mer, répartis entre les Caraïbes, l’océan Indien et le Pacifique, sont en première ligne face aux effets du changement climatique. Vagues de chaleur humide, cyclones, inondations et submersions marines menacent les bâtiments et les infrastructures. Une étude de l’ADEME dresse un état des lieux complet des impacts climatiques sur les bâtiments aux horizons 2050 et 2100. Que nous révèle cette analyse ?
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Les aléas climatiques qui menacent les bâtiments en Outre-mer
Vagues de chaleur humide : un risque invisible mais dangereux
Dans les territoires d’Outre-mer, les vagues de chaleur humide combinent des températures élevées et une forte humidité, créant des conditions éprouvantes pour les occupants des bâtiments.
En Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte, l’indice Humidex dépasse régulièrement les seuils de confort thermique, souvent supérieur à 40 dans ces territoires, indiquant un inconfort marqué, notamment durant les saisons humides de juillet à décembre en Guadeloupe et Martinique, et de janvier à mars à La Réunion et Mayotte., exposant les populations les plus vulnérables.
Les bâtiments mal isolés ou mal ventilés deviennent rapidement inconfortables, les systèmes de climatisation sont souvent sous-dimensionnés, et les matériaux légers accumulent la chaleur. Les hôpitaux, les écoles et les logements collectifs souffrent de surchauffes, aggravant les risques sanitaires.
Cyclones : des dommages matériels et humains de grande ampleur
Les cyclones, fréquents dans les Caraïbes et l’océan Indien, sont de plus en plus violents. En Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion, les vents puissants arrachent les toitures, les pluies torrentielles provoquent des inondations et les bâtiments mal conçus subissent de lourds dégâts. Le cyclone Maria, qui a frappé la Guadeloupe en 2017, a causé des dégâts estimés à plus de 100 millions d’euros.
Inondations et submersions marines : des côtes menacées
Les îles comme Mayotte, La Réunion ou les Antilles sont confrontées aux risques d’inondation et de submersion marine. Les hôtels en front de mer, les infrastructures touristiques et les habitations côtières sont particulièrement vulnérables. Les infiltrations d’eau dégradent les fondations, les façades et les structures, rendant les bâtiments dangereux.
Risques sanitaires : des conditions propices aux épidémies
La chaleur et l’humidité favorisent la prolifération des moustiques vecteurs de maladies comme la dengue, le chikungunya et le zika. Les bâtiments de santé, mal ventilés ou inadaptés, deviennent des foyers de transmission, tout comme les écoles surpeuplées. Les logements mal isolés deviennent des lieux de surchauffe, aggravant les pathologies respiratoires.
Des bâtiments vulnérables face aux aléas climatiques
Logements individuels et collectifs : fragilité et exposition accrue
Les logements, qu’ils soient individuels ou collectifs, sont souvent construits avec des matériaux légers ou mal isolés, une caractéristique qui les rend particulièrement vulnérables.
Les toitures mal fixées, sous l’effet des vents violents, peuvent être arrachées, tandis que les infiltrations d’eau dégradent les murs et affaiblissent la structure. Les fenêtres, si elles ne sont pas adaptées, laissent pénétrer la chaleur et l’humidité, transformant les pièces en véritables étuves. En période de chaleur humide, les systèmes de climatisation sous-dimensionnés peinent à maintenir un confort minimal.
Bâtiments publics : des infrastructures essentielles en danger
Les écoles, les hôpitaux, les mairies et autres administrations sont particulièrement exposés. Ces bâtiments, souvent surpeuplés en période de crise sanitaire, deviennent rapidement inconfortables lors des vagues de chaleur.
Les salles de classe mal ventilées se transforment en fournaises, tandis que les coupures d’électricité, fréquentes en cas de cyclone, compromettent les soins dans les centres de santé. Les hôpitaux, dépendants de systèmes de climatisation pour maintenir des conditions sanitaires adéquates, deviennent des lieux de vulnérabilité.
Hôtels et infrastructures touristiques : un secteur économique en première ligne
Les hôtels, surtout ceux situés en bord de mer, sont les premiers touchés par les cyclones, les inondations et la submersion marine. Les baies vitrées, pourtant attractives pour les touristes, deviennent des points faibles face aux vents puissants.
Les façades subissent les assauts des tempêtes, et les toitures sont endommagées. En période de chaleur humide, les clients souffrent d’un inconfort thermique, aggravé par des systèmes de climatisation souvent insuffisants ou mal entretenus.
Des solutions pour adapter les bâtiments aux aléas climatiques
- Renforcer la résilience des bâtiments existants : Les bâtiments doivent être solidifiés, notamment les toitures avec des fixations anti-cycloniques, tandis que les matériaux utilisés doivent être résistants à l’humidité et aux moisissures. Les systèmes de ventilation naturelle et mécanique doivent être optimisés pour améliorer le confort thermique, et dans les bâtiments publics comme les écoles et les hôpitaux, les systèmes de climatisation doivent être adaptés aux conditions locales. Les fenêtres doivent être renforcées avec des vitrages résistants aux vents violents.
- Intégrer les risques climatiques dans les projets de construction : Les nouvelles constructions doivent respecter des normes de résilience adaptées aux climats tropicaux. Cela inclut l’utilisation de matériaux tels que le bois local ou le béton résistant aux cyclones. Chaque projet doit être précédé d’une étude de risque climatique, et les zones à risque (inondables, littorales) doivent être évitées ou faire l’objet de normes strictes. Les permis de construire doivent être conditionnés à l’intégration de solutions de résilience.
- Sensibiliser et former les acteurs locaux : Les professionnels du BTP doivent bénéficier de formations spécifiques aux techniques de construction résilientes. Les habitants doivent être sensibilisés aux gestes de protection en cas d’aléas climatiques. Les collectivités locales doivent intégrer les risques climatiques dans les documents d’urbanisme (PLU, PPRN), et les écoles d’architecture et d’ingénierie doivent promouvoir les bonnes pratiques de conception climatique.
La feuille de route de l’ADEME ?
Des actions prioritaires pour renforcer la résilience (2022-2025)
L’ADEME a établi une feuille de route nationale pour l’adaptation des bâtiments au changement climatique, couvrant l’ensemble du territoire français, y compris les Outre-mer. Ces actions sont définies à l’échelle nationale, mais leur mise en œuvre peut être ajustée aux réalités climatiques spécifiques des Outre-mer. Parmi les priorités identifiées :
- Renforcer les normes de construction en intégrant des critères de résistance aux aléas climatiques (vents cycloniques, chaleur humide, submersions marines).
- Développer des outils de diagnostic des risques climatiques accessibles aux professionnels du BTP et aux collectivités, avec des cartographies des zones à risque.
- Former les professionnels à la conception de bâtiments résilients, notamment par des sessions de sensibilisation sur les matériaux adaptés aux climats tropicaux.
- Conditionner les subventions publiques à l’intégration de solutions d’adaptation dans les projets de construction ou de rénovation.
- Promouvoir des solutions de refroidissement passif (ventilation naturelle, toitures végétalisées) pour lutter contre les vagues de chaleur humide.
Vers une mobilisation collective pour l’adaptation
L’ADEME appelle à une mobilisation de tous les acteurs : collectivités, entreprises de construction, professionnels du BTP, mais aussi les habitants. Cette transition doit s’appuyer sur une coopération renforcée, des formations régulières et une sensibilisation continue. Pour que les bâtiments en Outre-mer restent debout demain, l’action doit commencer aujourd’hui.
État des lieux et étude prospective sur les impacts du changement climatique pour le bâtiment aux horizons 2050 et 2100 :
Les territoires d’Outre-mer sont en première ligne face aux effets du changement climatique. Vagues de chaleur, cyclones, inondations… les risques se multiplient, mais les solutions existent. Renforcer la résilience des bâtiments, former les professionnels, sensibiliser les habitants : l’adaptation est une nécessité.
Pour que les bâtiments en Outre-mer restent debout demain, l’action doit commencer aujourd’hui.