Le document principal du SDAGE 2022-2027 pour la Martinique, publié par l’Office de l’Eau Martinique sous la coordination du Comité de l’Eau et de la Biodiversité, fixe les lignes directrices de la gestion de l’eau sur le territoire jusqu’en 2027. Bien qu’adopté en 2022, ce cadre reste aujourd’hui la référence incontournable pour comprendre les politiques de l’eau en Martinique. Il s’agit d’un outil stratégique fondé sur la Directive Cadre sur l’Eau, qui s’impose aux collectivités et aux décideurs publics.
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Chiffres-clés du SDAGE 2022-2027 Martinique
- 49 masses d’eau concernées :
- 20 cours d’eau
- 1 plan d’eau artificiel (La Manzo)
- 19 masses d’eau côtières
- 1 masse d’eau de transition
- 8 masses d’eau souterraines
- 4 enjeux stratégiques : eau potable, qualité des milieux, milieux remarquables, adaptation climatique
- Un cycle de planification 2022 – 2027
- 1 programme de mesures (PDM) avec actions localisées et budgétées
- 17 contentieux européens en cours liés à la DCE
- Document juridiquement opposable aux documents d’urbanisme et décisions administratives
Pourquoi un SDAGE pour la Martinique ?
Le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) est la traduction locale de la Directive Cadre sur l’Eau (2000/60/CE), adoptée par l’Union européenne pour garantir un bon état des eaux d’ici 2027. Pour la Martinique, cela concerne 49 masses d’eau : 20 cours d’eau, un plan d’eau artificiel (La Manzo), 19 masses d’eau côtières, une de transition, et huit masses d’eau souterraines.
Le SDAGE est un document de planification à l’échelle du bassin hydrographique. Il n’introduit pas de nouvelles réglementations mais engage l’ensemble des décisions administratives en lien avec l’eau à respecter ses orientations. Il impose une approche intégrée de la ressource, prenant en compte à la fois la qualité chimique des eaux, la biodiversité aquatique, les usages humains et les risques naturels.
En Martinique, cette approche est particulièrement cruciale dans un contexte de pression foncière, de vulnérabilité climatique et de fragmentation des responsabilités institutionnelles.
Quatre grands enjeux pour un territoire insulaire
Structuré autour de quatre enjeux majeurs issus de la consultation du public, le SDAGE décline des Orientations Fondamentales (OF) concrètes :
- Préserver la ressource en eau potable. Cette priorité implique de protéger les captages d’eau brute contre les pollutions diffuses et accidentelles, de réduire les pertes dans les réseaux d’adduction, et de renforcer la sécurisation des installations de traitement et de distribution. Elle comprend également des exigences renforcées pour les zones de captage prioritaires.
- Reconquérir la qualité de l’eau et des milieux aquatiques. Le SDAGE cible une amélioration de l’état des cours d’eau, plans d’eau, eaux côtières et souterraines. Cela passe par la limitation des pollutions agricoles (nitrates, pesticides), une meilleure performance des systèmes d’assainissement collectif et non collectif, et la réduction des pollutions industrielles.
- Protéger les milieux remarquables. L’objectif est de restaurer les continuités écologiques, de préserver les zones humides, mangroves et autres écosystèmes littoraux, souvent menacés par l’urbanisation ou les aménagements touristiques. Des mesures foncières, réglementaires et de sensibilisation sont prévues à cet effet.
- Adapter la gestion de l’eau au changement climatique. Le SDAGE intègre une stratégie d’adaptation : renforcement de la résilience des réseaux d’eau, lutte contre l’érosion des sols, aménagements favorisant l’infiltration et la rétention des eaux pluviales, et anticipation des tensions sur la ressource durant les périodes de sécheresse prolongée.
Chaque Orientation est déclinée en « dispositions » précises, opposables aux projets d’urbanisme, d’assainissement, de construction ou d’aménagement du territoire. Leur mise en œuvre implique une coordination entre les services de l’État, les collectivités, les opérateurs de l’eau, les agriculteurs et les aménageurs.
Des objectifs mesurables et un suivi renforcé
Le SDAGE vise l’atteinte du bon état écologique et chimique des eaux de surface et des eaux souterraines, ainsi que la prévention de leur détérioration. Pour y parvenir, un programme de mesures (PDM) accompagne le schéma avec des actions réglementaires, techniques et financières localisées, déployées entre 2022 et 2027.
Ces actions couvrent les domaines de l’assainissement, de la gestion agricole, de la restauration des milieux naturels, et de la sensibilisation des acteurs. Le PDM identifie les porteurs de projet, les budgets prévisionnels et les échéances. Il s’appuie également sur des dispositifs contractuels (contrats de territoire, appels à projets, etc.) pour faciliter la mise en œuvre opérationnelle.
Ce programme est complété par un dispositif de surveillance des eaux, qui permet de mesurer les progrès réalisés. Toutefois, plusieurs indicateurs adaptés aux contextes tropicaux manquent encore (ex : absence d’indicateur intégrateur pour La Manzo ou de référentiel benthique pour les eaux littorales). Ces lacunes freinent l’évaluation complète de l’état des masses d’eau et sont au cœur des efforts de recherche et de coopération entre les institutions.
Un document opposable aux décisions publiques
Le SDAGE est juridiquement contraignant dans un rapport de compatibilité : les autorisations administratives (urbanisme, IOTA, ICPE), les documents d’urbanisme (SCoT, PLU) et les politiques publiques doivent être rendus compatibles avec ses objectifs.
Cela signifie que toute décision locale dans les domaines de l’eau ou de l’aménagement doit intégrer les orientations du SDAGE, sans quoi elle pourrait être annulée ou faire l’objet d’un recours. Cette opposabilité s’applique aussi aux documents stratégiques d’échelle régionale, tels que les schémas des carrières ou les schémas d’aménagement régionaux (SAR).
En Martinique, 17 contentieux européens sont en cours pour non-respect des exigences de la DCE, notamment du fait de l’inadaptation des outils nationaux au contexte local. Cela souligne l’importance d’un ajustement technique des indicateurs pour garantir l’effectivité du SDAGE, mais aussi d’une mobilisation de tous les acteurs pour éviter de nouvelles sanctions.
Un carrefour entre politiques de l’eau, de la mer et de la santé publique
Le SDAGE articule ses dispositions avec :
- Le PGRI (Plan de gestion des risques d’inondation), pour intégrer les enjeux d’érosion, de ruissellement et d’extension urbaine en zones sensibles. Il existe des dispositions communes sur la gestion des eaux pluviales, la limitation de l’imperméabilisation des sols, ou encore la protection des zones d’expansion des crues.
- Le Plan Chlordécone IV, qui impose des mesures spécifiques sur les sols et les eaux contaminés. Il s’agit d’éviter l’aggravation des pollutions existantes par les aménagements (dragage, terrassement, etc.) et de conditionner les projets à des analyses préalables et des mesures de compensation.
- Le Plan de gestion du Parc Naturel Marin de Martinique (PNMM), notamment pour la qualité des eaux littorales et la protection des habitats coralliens. Le SDAGE et le PNMM partagent plusieurs objectifs liés à la préservation des milieux côtiers et à la gestion durable des ressources marines.
Des dispositions communes sont identifiées, garantissant une cohérence inter-institutionnelle et une meilleure prise en compte des risques sanitaires, environnementaux et climatiques. Cela permet de renforcer l’efficacité des actions engagées, en évitant les doublons et en mutualisant les efforts.

SDAGE (Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestiondes Eaux) Martinique 2022-2027
Un cap clair pour la gestion de l’eau jusqu’en 2027
Outil de pilotage et de responsabilisation, le SDAGE 2022-2027 est une feuille de route ambitieuse qui engage tous les acteurs publics et privés impliqués dans l’aménagement, l’eau et l’environnement en Martinique.









