La Guyane s’est fixé un objectif ambitieux : atteindre 100 % d’électricité d’origine renouvelable d’ici 2030. Aujourd’hui, près de 60 % de sa production repose déjà sur l’hydraulique, le photovoltaïque et la biomasse. Mais derrière cette réussite énergétique se cache un enjeu moins visible : la gestion des déchets générés par ces installations. Panneaux solaires, chauffe-eaux, batteries ou bornes de recharge finissent par arriver en fin de vie, et leur traitement doit répondre à des obligations strictes. L’Agence de la transition écologique (ADEME) a publié un guide destiné à accompagner les professionnels et collectivités de Guyane dans la bonne gestion de ces équipements.
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Quand un chauffe-eau solaire doit être remplacé ?
Depuis l’an dernier, les chauffe-eaux solaires usagés relèvent de la filière des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE). Leur fin de vie n’est donc plus laissée au hasard : la collecte, la dépollution et la valorisation suivent désormais un cadre réglementaire précis.
Les fabricants et importateurs ont l’obligation d’adhérer à un éco-organisme (Ecosystem ou Ecologic) et de verser une éco-participation qui finance la filière. Les distributeurs, eux, doivent assurer la reprise des anciens appareils lors de la vente d’un modèle neuf.
Côté usagers, plusieurs solutions existent : déposer le matériel dans un point de collecte agréé, le rapporter à son fournisseur ou encore solliciter un enlèvement directement sur site lorsque le volume excède 500 kilos ou 2,5 m³.
La suite du parcours s’effectue hors du territoire : les équipements collectés sont expédiés vers la Guadeloupe, où l’entreprise AER procède au démantèlement.
Le verre des capteurs est broyé et transformé en sable réutilisable dans la construction, les métaux rejoignent des filières de recyclage spécialisées et les résidus non valorisables sont enfouis.
Panneaux photovoltaïques : reprise obligatoire et recyclage assuré
Les panneaux photovoltaïques font partie de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP). À ce titre, les entreprises qui mettent ces équipements sur le marché doivent s’enregistrer auprès de l’éco-organisme SOREN, tandis que les éléments périphériques (onduleurs, câbles, coffrets) sont gérés par Ecosystem ou Ecologic.
Quant aux distributeurs, ils sont tenus de récupérer sans frais les panneaux remplacés, selon le principe du « 1 pour 1 » ou même du « 1 pour 0 » pour les petits appareils de moins de 25 centimètres dans les grandes surfaces de vente.
La filière est déjà bien implantée en Guyane : en 2021, près de 93 tonnes de panneaux ont été collectées. Une fois arrivés en métropole, 94 % de leurs matériaux sont valorisés, principalement grâce à deux procédés : la délamination, qui consiste à séparer les couches des modules, et le broyage, qui permet de récupérer le verre, l’aluminium ou le silicium. Ces matières sont ensuite réinjectées dans de nouvelles chaînes de production.
Pour les propriétaires d’installations solaires, la démarche est simple : confier leurs panneaux usagés à un distributeur partenaire de SOREN ou les déposer dans un point de collecte identifié. L’ACORPE, relais local des éco-organismes, accompagne les professionnels et collectivités pour orienter vers les solutions adaptées.
Batteries et bornes de recharge : un enjeu sensible
Avec la montée en puissance des véhicules électriques et du stockage stationnaire, la question des batteries devient centrale. Plomb, nickel ou lithium : chacune de ces technologies possède une durée de vie limitée, comprise entre 5 et 15 ans. Leur gestion en fin de cycle nécessite une organisation spécifique et des filières de traitement spécialisées.

En Guyane, la collecte et le regroupement sont assurés par des opérateurs comme la SGVD ou IPES PENA. Les lots sont ensuite expédiés par voie maritime, principalement via MARFRET ou CMA-CGM, vers des usines en métropole ou en Allemagne. Là, plusieurs procédés sont utilisés : la pyrométallurgie et l’hydrométallurgie permettent d’extraire et de recycler les métaux, tandis que de nouvelles techniques de valorisation directe sont en développement.
Dans certains cas, les batteries lithium issues de véhicules électriques sont réemployées comme systèmes de stockage stationnaire.
Les bornes de recharge suivent une logique différente : elles intègrent la filière DEEE. Les producteurs doivent verser une éco-participation à Ecosystem ou Ecologic, et les structures de collecte se chargent du reste.
Pour les utilisateurs, remettre la borne à un éco-organisme est essentiel : c’est la seule manière de transférer la responsabilité juridique et environnementale.
Des relais locaux pour accompagner les professionnels
Le maillage local joue un rôle clé dans cette organisation. L’ACORPE constitue le point d’entrée en Guyane pour les éco-organismes nationaux. Son rôle est d’informer, conseiller et orienter les acteurs vers les bonnes solutions.
D’autres opérateurs complètent ce dispositif : KWALA FAYA intervient dans les zones isolées avec des actions de collecte et de réemploi, tandis que SARP Caraïbes, IPES PENA et la SGVD assurent différents services de collecte et de traitement des déchets dangereux ou non dangereux.
La réglementation impose également un suivi rigoureux. Les producteurs et les entreprises doivent tenir un registre chronologique des déchets sortants et conserver les bordereaux de suivi pendant plusieurs années.
Depuis peu, ces formalités s’effectuent de manière dématérialisée via la plateforme Trackdéchets, qui garantit la traçabilité depuis la collecte locale jusqu’au traitement final en Europe.
Consulter ici la publication de l’ADEME : Les filières déchets des énergies renouvelables et du stockage d’énergie, stationnaire et mobile – Edition du 08/2025
L’enjeu n’est plus seulement de produire une électricité propre, mais aussi de garantir une seconde vie aux équipements. En s’appuyant sur ses relais locaux et les éco-organismes agréés, la Guyane pose les bases d’un véritable cycle vertueux, où chaque panneau, chaque batterie et chaque borne devienne des ressources plutôt que des fardeaux.